
Bien que discrète et souvent éclipsée par l’éclat d’Orion ou la splendeur des Gémeaux, la constellation de la Licorne recèle pourtant bien des trésors… Située dans la Voie lactée, elle abrite de nombreuses nébuleuses parmi les plus impressionnantes du ciel boréal. Ces vastes nuages de gaz et de poussières, sculptés par la dynamique des vents stellaires et les radiations des jeunes étoiles massives, témoignent de la perpétuelle évolution du milieu interstellaire.
L’image présentée ici illustre parfaitement la richesse de cette région en dévoilant avec un signal remarquable plusieurs objets emblématiques, et notamment la nébuleuse de la Rosette (NGC 2237), la nébuleuse du Cône et l’amas de l’Arbre de Noël (NGC 2264), la nébuleuse par réflexion IC 447, ainsi que le moins connu rémanent de supernova SNR G206.9+2.3. Une petite présentation s’impose !
Située à environ 5200 années-lumière, la nébuleuse de la Rosette est l’un des plus beaux exemples de nébuleuse en émission du ciel nocturne.
Sculptée par les puissants vents stellaires générés par les étoiles massives du jeune amas NGC 2244 niché en son cœur, elle s’étend sur un diamètre d’environ 130 années-lumière, soit bien plus que sa célèbre voisine d’Orion (24 AL)… qui pourrait tenir toute entière dans sa seule région centrale !
Les étoiles de l’amas, de type O et B, ionisent les gaz environnants, notamment l’hydrogène, produisant ainsi une intense émission dans la raie Hα (656,3 nm), qui donne à la nébuleuse sa teinte rougeâtre caractéristique dans les images en lumière visible.
Cette intense activité de formation stellaire est marquée par la présence de globules de Bok et de piliers de gaz, des structures évocatrices de celles observées dans la célèbre nébuleuse de l’Aigle (M16).
Située à une distance de 2500 années-lumière, NGC 2264 est une région de formation stellaire active, composée de plusieurs structures remarquables :
La présence de protoétoiles profondément enfouies dans de plus denses cocons de poussières est révélée par les observations infrarouges, témoignant d’un processus de formation stellaire en cours. Comme dans la nébuleuse de la Rosette, les radiations des jeunes étoiles massives façonnent l’environnement et influencent le cycle de vie des générations futures d’astres.
Contrairement aux nébuleuses précédentes, dominées par l’émission d’hydrogène ionisé, IC 447 est principalement une nébuleuse par réflexion. Située à environ 3 000 années-lumière, elle se compose de gaz et de poussières qui diffusent la lumière des jeunes étoiles massives à proximité. Cela lui confère un éclat bleuté typique des nébuleuses par réflexion, similaire à la célèbre nébuleuse de l’Iris (NGC 7023) dans la constellation de Céphée.
L’illumination partielle de ces nuages moléculaires par les étoiles environnantes produit un jeu subtil d’ombres et de lumières, donnant à IC 447 un aspect particulièrement structuré et détaillé sur les images à haute résolution.
Parmi les structures plus discrètes révélées sur cette image (en bas au centre) figure SNR G206.9+2.3, un rémanent de supernova certes bien moins spectaculaire que les célèbres vestiges comme la nébuleuse du Crabe (M1) ou les Dentelles du Cygne, mais d’une morphologie tout à fait caractéristique (qui lui a valu le surnom de « trilobite »).
Ces filaments ténus et évanescents de matière en expansion constituent le dernier témoignage de l’explosion d’une étoile massive survenue il y a plusieurs milliers d’années.
Particulièrement visible dans la raie OIII de l’oxygène, révélant la présence de gaz ionisé balayé par l’onde de choc de l’explosion, son acquisition reste délicate en raison de sa faible brillance de surface. Seuls l’utilisation de filtres spécifiques, un long temps de pose et un traitement d’image soigné permettent de distinguer ces structures à la fois éthérées et ciselées sur le fond du ciel, comme le prouve l’impressionnant cliché de cet objet réalisé par Pete XL (ci-contre).
Avec un temps de pose plus limité, cet objet apparait toutefois bien distinctement sur l’image présentée ici… ce qui pourra sans nul doute donner des idées de cibles potentielles aux astrophotographes souhaitant sortir des sentiers battus !
L’image présentée ici, réalisée par Christian Bertincourt, est une mosaïque de quatre panneaux, réalisée avec une minutie remarquable pour couvrir un champ aussi vaste. Malgré un matériel résolument orienté vers le champ large en ciel profond (lunette à f/3.9 avec un capteur 6200), ce type de montage reste nécessaire pour capturer en une seule composition des objets aussi importants s’étendant sur plusieurs degrés dans le ciel.
Christian a utilisé un filtre dualband Hα et OIII (Antlia ALP-T Ha/OIII) en association avec une caméra couleur (ASI 6200MC) : cette technique d’imagerie narrowband permet de maximiser le contraste et révéler des structures difficilement visibles avec des filtres LRGB classiques. L’émission en hydrogène alpha met en évidence les régions d’ionisation les plus actives, tandis que l’oxygène ionisé (OIII) permet de distinguer des zones plus énergétiques où les jeunes étoiles influencent leur environnement.
Ces acquisitions narrowband étaient il y a encore quelques années réservées aux caméras monochromes… Mais l’avènement des capteurs CMOS très performants et de ces nouveaux filtres à multi-bandes étroites rend désormais cette technique parfaitement accessible aux capteurs couleurs, avec à la clé de superbes résultats.
Si la résolution reste plus limitée qu’avec un capteur monochrome (en raison de la présence de la matrice de Bayer), cette combinaison offre cependant des avantages indéniables : notamment sa simplicité et sa rapidité puisque les différentes couches sont acquises en même temps.
Ainsi, pour cette image, consistant pourtant en une mosaïque de 4 panneaux, le temps de pose global ne dépasse pas les 6h… soit seulement 1h30 par panneau ! Un résultat qui serait tout simplement inenvisageable avec un capteur monochrome, avec lequel les différentes couches auraient dû être acquises séparément…
Au-delà des acquisitions, on ne peut que constater aussi la très grande qualité du traitement réalisé.
Parmi les points forts évidents de cette image, on relèvera notamment :
Au-delà de ses qualités techniques, cette image frappe avant tout par son impact visuel d’ensemble, donnant une impression saisissante de profondeur et de dynamisme. Les forces titanesques à l’œuvre – vents stellaires et radiations intenses – qui ont façonné au fil du temps ces nuages de gaz et de poussières, semblent ici presque tangibles, conférant ainsi à l’image un aspect véritablement dramatique.
Cette image illustre avec brio la richesse des structures interstellaires de la constellation de la Licorne, une région du ciel parfois délaissée au profit d’Orion, mais qui mérite pleinement l’attention des astrophotographes !
Jeune retraité de 63 ans, Christian Bertincourt est passionné par la photo et l’astronomie depuis le passage de la comète Hale-Bopp en 1997, qu’il avais immortalisé à l’époque avec un Olympus OM-1.
Après l’acquisition de nombreux télescopes (C8, C11, C14) pour l’observation et la photographie des planètes, Christian a franchi le pas de l’astrophotographie après son arrivée dans la région Lyonnaise (Bortle 6). Depuis 2021, il dispose d’un matériel performant avec une lunette FRA600 et une caméra ASI 6200MC : un setup idéal pour le grand champ profond !
Astrophotographe passionné, méthodique et soucieux de repousser ses limites, il n’hésite pas à partir en quête des meilleurs cieux et à explorer différentes régions de France pour échapper à la pollution lumineuse et capturer de images encore plus belles sous un ciel sombre.
Cette approche lui permet de sublimer les acquisitions et d’obtenir de superbes résultats, comme le prouve la visite de sa galerie. Classée par ordre chronologique, celle-ci permet d’apprécier encore mieux les progrès accomplis ces dernières années !
Christian est par ailleurs membre des clubs « Albiréo78 » dans les Yvelines et du « CAML » dans le Rhône, où il partage sa passion avec d’autres férus d’astronomie.
Date : 29 décembre 2024
Lieu : Le Bessat (Loire)
Optique : ASKAR FRA 600 f/3.9
Monture : Ioptron GEM56
Caméra : ZWO ASI-6200 MC-Pro (-10°)
Filtres : Antlia ALP-T Ha/OIII
Ha/OIII : 4 x (18 x 300s)
Total : 6h
Échantillonnage : 1,85″/px
Traitement : Siril – Pixinsight – Photoshop
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