
Protégé : Photons d’Or – Décembre 2025
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La « mort » d’une étoile peut prendre des formes différentes en fonction de la masse initiale de celle-ci. Dans tous les cas, la cause de cette mort est l’épuisement des réserves d’hydrogène de l’étoile, son carburant principal pendant l’essentiel de sa vie.
En dessous de 0,8 masse solaire, la force gravitationnelle de l’étoile n’est pas suffisante pour amorcer d’autres réactions que celle de l’hydrogène ; ce qui conduit l’étoile à s’effondrer lentement sur elle-même et à se refroidir sur plusieurs dizaines de milliards d’années sous la forme d’une « naine rouge ». Au contraire, au-delà de 8 masses solaires, l’étoile fabrique des éléments de plus en plus lourds (jusqu’à être constituée d’un cœur de fer) avant d’exploser en supernova, l’un des phénomènes les plus énergétiques de l’Univers… Et au-delà de 20 masses solaires, cette explosion peut même engendrer un trou noir stellaire.
Mais pour expliquer l’image présentée ce mois-ci, nous allons en dire un peu plus sur les étoiles plus « banales », comprises entre 0,8 et 8 masses solaires, dont l’existence s’achève par la création d’une magnifique – mais éphémère – « nébuleuse planétaire ».
Pour ces étoiles, au terme de la séquence principale (c’est à dire lorsque l’étoile a fini de consumer ses réserves d’hydrogène et d’hélium), leur noyau s’effondre tandis que leurs couches externes sont expulsées dans l’espace par la pression de radiation, à une vitesse phénoménale de plusieurs dizaines de kilomètres par secondes (100 000 km/h en moyenne).
Il ne reste alors plus au centre qu’une étoile massive et compacte, une « naine blanche », dotée d’une température de surface élevée (environ 100 000°) et dont le rayonnement fortement énergétique vient ioniser les gaz expulsés, qui deviennent ainsi observables dans le spectre visible.
Dans la plupart des cas, les gaz ainsi expulsés prennent une forme globalement sphérique (ce qui semble logique puisque cette forme était également celle de l’étoile avant l’expulsion de son atmosphère…) : c’est par exemple le cas des nébuleuses M57, NGC 7293, M27, ou encore NGC 2392…
Cet aspect est à l’origine de la dénomination de ces nébuleuses : lorsqu’elles ont été observées pour la première fois au XVIIIe siècle (notamment M27 par Messier en 1764, puis par Herschel en 1785), les observateurs ont noté une ressemblance visuelle de ces anneaux diffus avec les planètes… d’où le nom de « nébuleuse planétaire« . On sait toutefois depuis le milieu du XIXe siècle, et les premières observations spectroscopiques de ces objets, que ces derniers n’ont rien à voir avec les planètes !
La « nébuleuse de l’œil de chat », présentée ici, a d’ailleurs joué un rôle important dans la compréhension de ces objets, puisqu’elle a été la première nébuleuse planétaire a être étudiée par spectroscopie par William Huggins en 1864. Ces observations ont permis de mettre en évidence la présence importante d’hydrogène, mais également d’un autre élément inconnu émettant à une longueur d’onde de 501nm, que Huggins appela « nebulium« .
Il fallu attendre 1928 et le développement de la mécanique quantique pour que cette énigme ne soit finalement résolue, notamment par l’astronome américain Ira Bowen : les raies du « nébulium » correspondent en réalité à l’ionisation des atomes d’oxygène et d’azote émettant des raies de transition interdite (raison pour laquelle ces raies n’avaient jamais été observées sur Terre…) et aboutissant à la création d’oxygène doublement ionisé (le fameux « OIII » bien connu aujourd’hui par tout astrophotographe amateur).
L’avènement de la photographie a par ailleurs contredit les observations visuelles relatives à l’aspect de ces nébuleuses. Avec l’amélioration des techniques de prise de vue et du matériel, les astronomes se sont rapidement rendus à l’évidence : l’aspect globalement sphérique de ces objets n’est qu’une illusion et cache une complexité bien plus grande : extensions plus ténues, matières enchevêtrées, structures distinctes aux différentes échelles…
L’image ci-contre de la nébuleuse de la Lyre (M57) montre bien la différence importante qu’il peut y avoir entre la vision « classique » d’une nébuleuse planétaire (en visuel ou en photo avec une détectivité limitée) et la vision « globale » intégrant des structures plus discrètes à des échelles différentes. L’objet dans son ensemble se révèle ainsi beaucoup plus complexe !
Les nébuleuses planétaires sont aujourd’hui classées, selon leur morphologie, en 3 grandes catégories : sphériques, ellipsoïdales et bipolaires (auxquelles se rajoutent des catégories secondaires telles que les nébuleuses planétaires à symétrie centrale, par exemple). A noter qu’il n’est pas simple, dans certains cas, de classer une nébuleuse planétaire ; d’une part car l’axe de vision de celle-ci peut s’avérer trompeur (par exemple, dans le cas de M57, la question n’est pas tranchée car la vue « de dessus » pourrait cacher une structure allongée ou bipolaire) mais aussi car la taille réelle de la nébuleuse peut s’avérer difficile à déterminer avec précision.
Dans tous les cas, cette complexité accrue a obligé les astronomes à revoir les modèles théoriques afin de pouvoir rendre compte des observations et notamment de la présence de différentes « couches » de matière. On pense aujourd’hui que la première expulsion, au terme de la séquence principale, implique des gaz denses et peu rapides. L’étoile devient ensuite une géante rouge, qui s’accompagne d’une deuxième phase de vent stellaire, rapide mais peu dense, qui vient compresser la matière précédemment expulsée en forme de « coquille » assez fine. Une fois la géante rouge effondrée en naine blanche, le rayonnement de celle-ci vient ioniser le gaz expulsé et rend la nébuleuse « visible ».
Mais pour certaines nébuleuses, ces modèles doivent encore être peaufinés pour tenir compte d’autres paramètres.
C’est le cas de la nébuleuse de l’œil de chat, qui présente une structure en 3 échelles :
(Ces deux dernières structures peuvent être admirées en détails sur l’image ci-contre, réalisée par le télescope spatial Hubble).
Le modèle majoritairement admis par les astronomes pour rendre compte de cette structure est que cette nébuleuse abrite en son centre un système binaire : la rotation des deux étoiles l’une autour de l’autre expliquerait la géométrie obtenue lors de l’expulsion des couches externes de l’étoile centrale ; le compagnon stellaire en orbite venant perturber la diffusion de matière en lui imprimant une dynamique spécifique.
Particulièrement visible sur la zone centrale, cette influence est aussi perceptible sur la coquille externe puisque le compagnon serait responsable de la création de 2 « jets » perpendiculaires à l’anneau équatorial et bien visibles sur l’image présentée ici.
Autre spécificité de cette nébuleuse : l’une des deux étoiles centrales ne serait pas une naine blanche, mais une étoile de Wolf-Rayet, une étoile géante en fin de vie expulsant régulièrement de la matière sous forme de vent stellaire à très haute vélocité.
Une étoile de ce type produit des expulsions de matière beaucoup plus nombreuses et sur une durée plus longue qu’une étoile parvenant au stade de naine blanche.
Dans ce cas, les premières expulsions (qui forment aujourd’hui la couronne externe) auraient débuté il y a environ 15 000 ans et auraient cessé il y a seulement 1000 ans, époque à laquelle la zone centrale de la nébuleuse aurait commencé à se former.
La masse de la couronne externe est estimée entre 0,3 et 1 masse solaire, la masse de la structure annulaire à environ 0,1 masse solaire et la masse totale du cœur à environ 0,05 masse solaire. Certaines théories expliquent ces phases successives de création de l’enveloppe non pas par l’activité régulière d’une étoile en fin de vie (géante rouge) mais par des changements brutaux de masse de l’étoile centrale (ce qui est cohérent ici avec la présence d’une étoile de Wolf-Rayet). La présence d’un compagnon pouvant fortement altérer le champ magnétique du système, comme dans le cas présent, est également à prendre en compte.
Mais il n’en demeure pas moins que la mécanique précise des nébuleuses planétaires demeure encore aujourd’hui mal comprise et constitue un sujet d’études et d’observations passionnant, y compris pour les amateurs souhaitant découvrir de nouveaux objets ! Les nébuleuses planétaires sont loin d’avoir encore révélé tous leurs mystères !
Lorsqu’un objet présente une dynamique de luminosité trop importante, il n’est pas possible de le photographier en une seule prise. En cause, la réponse linéaire du capteur, bien moins performante en ce domaine que l’œil humain qui possède une très grande dynamique. A titre de comparaison triviale, c’est un peu la même chose que d’essayer de prendre une photographie diurne en contre-jour !
Dans ce cas de figure, le plus simple est de réaliser deux images avec des temps de pose différents, puis d’assembler ces images en mode HDR afin de restituer à l’objet l’ensemble des détails sur l’ensemble du champ. Pour ce faire, on réalise une série de poses longues pour mettre en évidence les zones ténues de l’image, et une série de poses courtes pour révéler les détails cachés dans les zones les plus lumineuses. Cette technique n’est pas spécifique aux nébuleuses planétaires, puisqu’on peut aussi l’utiliser pour les nébuleuses diffuses (par exemple pour M42) ou les galaxies (M31…). Mais il n’en demeure pas moins que les nébuleuses planétaires constituent souvent des cibles de choix pour cette méthode, en raison de leurs structures complexes et très contrastées. Il est par ailleurs possible de réunir poses longues et « lucky imaging » (technique dérivée du planétaire avec des poses très courtes pour limiter les effets de la turbulence) pour obtenir des images spectaculaires conciliant détails et détectivité (par exemple cette superbe image de M27 réalisée par Stéphane Gonzalez, Sébastien Kuenlin et Mathieu Guinot).
C’est précisément cette technique qu’a utilisé Alexandre Targe pour révéler les structures de la nébuleuse de l’œil de chat aux différentes échelles : un très grand nombre de poses courtes (1000 images de 20 secondes en LRGB et de 60 secondes en Ha) sur le cœur central, puis une série de poses longues classiques (243 poses de 300s en Ha et OIII) pour mettre en valeur l’enveloppe externe de la nébuleuse.
L’étape cruciale d’un tel travail se joue ensuite essentiellement au traitement, puisqu’il faut intégrer les images « poses courtes » dans l’image « poses longues » de manière harmonieuse, sans créer une rupture brutale de dynamique. Pour ce faire, la combinaison HDR donne généralement de bons résultats, mais ne dispense pas d’un long travail de calques et de masques pour obtenir un résultat final satisfaisant. Une trentaine d’heures de traitement (sans compter le prétraitement) ont ainsi été nécessaires à Alexandre pour parvenir à ce résultat très spectaculaire et qualitatif : la dynamique d’ensemble est respectée, les détails dans la zone centrale sont bien présents et assez fins compte-tenu du matériel utilisé, la couronne externe est particulièrement bien mise en valeur et la petite galaxie NGC6552 présente un beau signal (preuve d’une bonne détectivité de l’image).
Autres « bons points » : la bonne gestion du bruit sur l’ensemble de l’image, le très bon contraste d’ensemble ainsi qu’une magnifique palette de couleurs dans la couronne externe.
Sur ce dernier point, on pourra regretter que la zone centrale du cœur soit, en comparaison, dépourvue de couleurs. Naturellement, il n’est jamais simple de conserver des couleurs sur les zones proches de la saturation en luminosité, aussi il aurait peut-être été possible de conserver quelques couleurs en abaissant un peu la luminosité de la région centrale ; mais l’exercice est assurément assez compliqué et on ne peut pas reprocher d’avoir voulu conserver au maximum la dynamique de l’objet.
Autre « défaut qui n’en n’est pas un » : la présence assez imposante des aigrettes de diffraction sur l’image finale. La gestion des aigrettes est souvent source de nombreux problèmes lors du traitement ; et plus encore sur des objets très lumineux car ces dernières peuvent devenir « envahissantes » et masquer d’autres objets. Sur ce point, deux approches sont possibles : respecter les limitations techniques du matériel et conserver les aigrettes comme un élément propre de l’image, ou chercher à les dissimuler. Ces deux approches (« puriste » et « artistique« ) sont tout autant bien fondées et légitimes, et il revient à chacun de se faire sa propre opinion en fonction de l’objet en cause et de la gêne potentielle causée par ces défauts optiques.
Signalons que sur cette image, ces artefacts peuvent être largement atténués au traitement ; ci-contre un traitement personnel réalisé avec l’autorisation de l’auteur.
L’opération se réalise assez facilement et en quelques minutes sous Photoshop, au moyen de calques et de masques de fusion, en jouant à la fois sur la luminosité des zones concernées et sur la couleur.
La principale difficulté est d’éviter à tout prix de perdre des détails au cours de l’opération (en particulier ici dans la zone des anneaux concentriques) ou d’en inventer de nouveaux : l’outil « tampon » est donc à bannir en mode luminance, mais reste acceptable pour en mode chrominance.
Quoi qu’il en soit, compte-tenu de la difficulté de l’objet, de l’ambition du projet et du nombre d’heures consacrées à sa réalisation, on ne s’attardera pas sur ces pistes de possibles améliorations (qui peuvent aussi relever du parti-pris): l’image est superbe et l’objectif que s’était fixé Alexandre pour célébrer ses 2 premières années d’astrophoto est plus que réussi !

S’étant lancé dans l’astrophotographie depuis 2 ans, Alexandre (« AlexKid » sur les forums) a rapidement pris ses marques et publie régulièrement de magnifiques images d’objets très différents, soit avec son propre matériel, soit avec des acquisitions réalisées en remote.
Disposant d’un setup performant et n’hésitant pas à consacrer plusieurs dizaines d’heures à ses traitements, sa « courbe de progression » est très impressionnante et chacune de ses images révèle une véritable attention apportée aux détails et à la palette des couleurs, des « petits plus » qui transforment une image normale en cliché qu’on ne se lasse pas d’admirer !
Membre de la team « Astrofleet », Alexandre participe également à de nombreux projets collaboratifs dans le but de cumuler de nombreuses heures de pose et de partager les compétences de chacun ; ce qui reste la meilleure manière de continuer à toujours progresser !
Date : 5 au 20 juillet 2021 (6 nuits)
Lieu : Isère
Optique : GSO RC8″ Carbone
Monture : iOptron CEM70
Caméra : ZWO ASI 2600 MM Pro
Filtres : Antilla & Baader
Guidage : DO / ZWO ASI 174 mini
Bortle : 5
H : 177 x 300s (bin1) + 100 x 60s (bin1) + 100 x 60s (bin2)
OIII : 66 x 300s (bin1)
L : 100 x 20s (bin1) + 100 x 20s (bin2)
R : 100 x 20s (bin1) + 100 x 20s (bin2)
G : 100 x 20s (bin1) + 100 x 20s (bin2)
B : 100 x 20s (bin1) + 100 x 20s (bin2)
Total : 28h02
Traitement : Pixinsight / PS

Les Photons d’Or récompensent chaque mois une image particulièrement remarquable réalisée par un amateur… n’hésitez pas à proposer vos images !

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L’image du mois Novembre 2025 Le feu d’artifice et l’hippocampe : la région de NGC 6946 et de Barnard 150, en LRGB+Ha, par Martin Dufour. Ce mois-ci, nous ne célébrons pas seulement une galaxie, mais une leçon de perspective. L’image

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