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Nom : IC 1805 – NGC 896 – Sh2-190 – « Nébuleuse du Cœur »
Type : Nébuleuse par émission
Distance : 7500 AL
Taille : 150′ x 150′ (~200AL)
Magnitude : 6,5
Meilleure période d’observation : Automne
La nébuleuse du Cœur est l’une des « stars » du ciel d’automne. De part ses dimensions, la richesse de sa structure, ses couleurs subtiles et sa forme globale se prêtant à la paréidolie, elle constitue une cible incontournable ! Paradoxalement, c’est dans la constellation de Cassiopée – reine demeurée célèbre pour son orgueil et sa vanité et condamnée par les Dieux à tourner éternellement autour de la Polaire – que se trouve ce « cœur » céleste.
Située à environ 7500 années-lumière, soit 5 fois plus éloignée que les nébuleuses d’Orion ou California par exemple, elle n’en présente pas moins des dimensions apparentes conséquentes et des détails fascinants, notamment dans les zones sombres qui bordent l’extérieur de la structure. La nébuleuse, s’étend ainsi dans le ciel sur une taille apparente de 1°, soit le double de la pleine Lune.
Au centre de la nébuleuse, l’amas ouvert Melotte 15 contient de nombreuses étoiles jeunes, massives et chaudes, dont les radiations et les vents intenses sculptent les nuages de gaz environnants sur une zone de plus de 200 années-lumière. L’amas lui-même s’est formé très récemment, puisque celui-ci est âgé tout au plus de 1,5 millions d’années… un battement de cil à l’échelle de temps cosmique !
Parmi les étoiles les plus remarquables de cet amas, figure notamment HD 15570, qui est considérée comme l’une des étoiles les plus massives et les plus lumineuses de la galaxie avec une luminosité presque 3 millions de fois supérieure à celle du Soleil, pour une masse environ 100 fois supérieure.
Mais avec une masse estimée à environ 150 masses solaires, c’est bien son étoile voisine HD 15558 qui se approche de la « limite » théorique de masse pour une étoile. En effet, au-delà de cette masse, les astronomes estiment qu’il est plus probable que le nuage de gaz en contraction se scinde en plusieurs parties pour donner naissance à plusieurs étoiles de masses unitaires moindres.
A noter que le record absolu en la matière est détenu par l’étoile R136a1, une étoile de Wolf-Rayet située dans le Grand Nuage de Magellan, avec une masse estimée comprise entre 250 et 300 masses solaires. La « limite » théorique de 150 masses solaires n’est donc pas absolue, mais le nombre d’étoiles qui dépassent cette limite est sans aucun doute statistiquement très faible ; la création de tels « monstres » isolés étant vraisemblablement liée à des conditions de formation assez inhabituelles. Par ailleurs, la durée de vie de telles étoiles supermassives étant très courte (de l’ordre de quelques millions à quelques dizaines de millions d’années), le nombre de spécimens observables est très réduit !
Le rayonnement puissant généré par ces étoiles ionise les nuages de gaz environnants et donnent au « cœur » son aspect si particulier. La composition de cette nébuleuse est classique : la plus grande partie est constituée de nuage d’hydrogène, et dans une moindre mesure de poussières, visibles par contraste lorsqu’elles se trouvent en avant-plan des zones ionisées.
L’image ci-contre, réalisée par le télescope spatial infrarouge WISE, permet de bien visualiser les bandes de poussières qui parcourent cette nébuleuse.
L’image est composée en couleurs codées, pour 4 longueurs d’onde différentes : le bleu et le cyan représentent les longueurs d’onde de 3,4 et 4,6 microns, correspondant essentiellement à la lumière des étoiles ; tandis que les couleurs rouge et verte représentent les longueurs d’onde de 12 et 22 microns et permettent de visualiser les zones de poussière chaude.
La première version, qui date de 2014, est l’une de mes premières images « sérieuses » en ciel profond. Elle a été réalisée avec une lunette apo 66/400 et un APN au format APS-C.
Malgré le champ important offert par cette combinaison, la nébuleuse rentre tout juste dans le cadre !
L’APN (Canon 1100D) étant défiltré et refiltré Astrodon, cela m’a permis de capter l’essentiel du rayonnement de la nébuleuse, en Ha.
Malgré 5h de pose (mon record à l’époque !) le signal demeure limité ; ce qui rend le traitement assez difficile. La nébuleuse du Cœur n’est pas particulièrement lumineuse…
Le traitement initial, réalisé avec Photoshop, présentait une dominante magenta assez prononcée ; l’équilibre colorimétrique n’étant pas évident à obtenir en raison de l’utilisation d’un filtre « skyglow » et de la prédominance de la couche rouge. Le signal limité n’arrange évidemment pas les choses…
Le traitement final constitue une « reprise » avec Pixinsight, dont les fonctionnalités permettent d’obtenir un équilibre colorimétrique plus fiable des couleurs, notamment par une calibration sur les étoiles, ainsi qu’une meilleure exploitation du signal disponible, notamment pour mettre en valeur les zones de transition avec le fond de ciel.
Matériel :
Astropro 66/400 (f/6)
AZEQ6 via EQmod
Canon 1100D Astrodon (800iso)
Guidage : lunette-guide 9×50 et PLA-MX
Filtre Orion Skyglow
Pixinsight – Photoshop
Acquisition :
30 x 600s
Intégration totale : 5h
Date(s) de prise de vue : 18 octobre 2014
La seconde version, dont les acquisitions ont été réalisées à la fin de l’été 2018 (ce qui n’est pas encore la période la plus favorable pour photographier cette nébuleuse), n’a été traitée et publiée qu’en octobre 2019.
Il s’agit d’une image réalisée avec une TSA102, une CCD AtikOne et des filtres bande-étroite, en SHO 6nm.
Avec un temps de pose limité de seulement 7h (dont 5h uniquement pour la couche Ha), je comptais ajouter par la suite quelques heures de poses complémentaires, essentiellement avec les filtres OIII et SII, afin d’obtenir une image moins bruitée. Malheureusement, quelques déboires techniques m’ont contraint à renoncer à ce projet et j’ai du me contenter des données acquises initialement, sans avoir pu ajouter une série de poses RGB pour redonner aux étoiles leur couleur naturelle (ce qui est toujours un « plus » pour une image SHO).
Malgré le temps de pose global limité et la présence d’une quasi-pleine Lune, la réalisation de brutes Ha de 900s m’a permis de capter un signal suffisant tout en maintenant une résolution suffisante pour mettre en valeur de nombreux détails (bien aidé par un seeing correct et un autoguidage impeccable). Les poses ayant été réalisées en été, avec une température extérieure assez élevée même en pleine nuit, le refroidissement n’a pu être poussé qu’à -10°, ce qui permet déjà de réduire fortement le bruit thermique, mais il aurait bien sûr été plus intéressant d’abaisser encore un peu la température du capteur.
Comme je le fais souvent lorsque je photographie en nomade, j’ai réalisé la couche Ha en bin1, et les couches SII et OIII en bin2. L’ensemble des informations essentielles pour les détails étant présents sur la couche Ha, la finesse du résultat final n’en pâtit donc pas puisque cette couche Ha a également servi d’image de Luminance lors du traitement.
Même s’il est compliqué de comparer ces deux images, tant le matériel d’acquisition est différent, il n’en reste pas moins que l’image SHO est incontestablement plus riche que la version RGB : la nébuleuse semble bien plus dense et prend toute sa mesure, sans aucune zone “vide” et avec des contrastes bien plus prononcés.
Bien qu’il s’agisse de « fausses couleurs », la richesse de ces dernières est cependant bien plus grande. Là où la version APN donne un résultat globalement uniforme en terme de teintes, la version SHO permet de révéler de subtiles nuances, synonymes de variations dans la composition physique de la nébuleuse. Ces nuances sont particulièrement prononcées dans la zone de l’amas ouvert central Melotte15, qui prend une toute autre ampleur dans la version SHO ; en semblant surgir de manière presque dynamique de la nébuleuse environnante, avec des variations de couleurs très rapides.
Enfin, l’utilisation d’un capteur monochrome couplé à des filtres très sélectifs permet d’obtenir des détails bien plus fins que sur la version APN : non seulement les étoiles sont plus fines, mais les nébulosités et les bandes de poussières obscures présentent beaucoup plus de dégradés et de détails.
Matériel :
Takahashi TSA102 – f/6
AZEQ6 via EQmod
CCD AtikOne6.0 (-10°)
Guidage : Atik OAG + AtikGP
Filtres Astronomik SHO (6nm)
Pixinsight – Photoshop
Acquisition :
Ha : 20 x 900s (bin1)
OIII : 6 x 600s (bin2)
SII : 6 x 600s (bin2)
Intégration totale : 7h
Date(s) de prise de vue : 23 août 2018
La nébuleuse du cœur est une cible de difficulté intermédiaire. Les deux principales difficultés tiennent à sa dimension apparente importante et sa faible luminosité de surface (en dehors de l’amas central et, dans une moindre mesure, de la zone de la « tête de poisson », identifiée sous la dénomination IC 1795).
Il est donc nécessaire d’utiliser une combinaison d’optique et de capteur offrant un champ important et parfaitement plan afin de faire tenir l’ensemble de la nébuleuse dans le cadre et de conserver des étoiles fines jusque dans les coins. Sur la version APN présentée ici, réalisée avec une focale de 400mm et un capteur au format APS-C, on constate que la nébuleuse est déjà un peu à l’étroit. Les possesseurs de capteurs plein format 24×36 ou de focales très courtes (FSQ) ne seront pas confrontés à ce problème… pour les autres en revanche, il sera nécessaire de recourir à une mosaïque, ou d’abandonner leur instrument habituel au bénéfice d’un objectif photo.
A noter qu’un objectif photo de focale limitée (200 à 300 mm selon le capteur) permet de photographier en même temps la nébuleuse du cœur et sa voisine, la nébuleuse « de l’âme » (IC 1848), dont la beauté n’a rien à lui envier.
Ces deux nébuleuses étant assez similaires en termes de couleurs et de luminosité, leur association sur un même cliché offre un rendu absolument féerique, que ce soit en RGB ou en SHO.
Avec un objectif photo de plus faible focale (100 à 135 mm selon le capteur), il est également possible d’inclure dans le champ, outre les deux nébuleuses de l’âme et du cœur, le double amas de Persée. Le contraste entre ces objets, ajouté à leur pure beauté intrinsèque, offre l’un des plus beaux grand champ photographique du ciel boréal.
La faible luminosité de surface de la nébuleuse IC 1805 impose d’opter pour un temps de pose global conséquent… mais en automne les nuits sont déjà suffisamment longues pour pouvoir prévoir une session sur une seule nuit. Bien sûr, il est toujours recommandé de consacrer au moins deux nuits pour gagner en signal exploitable au traitement, et espérer révéler avec plus de facilité toutes les subtilités de cette nébuleuse !
Si le temps de pose global est important, il peut être opportun sur cette cible d’augmenter le temps de pose des images unitaires (si la qualité du ciel, la monture et la précision de l’autoguidage le permettent), du moins pour les utilisateurs de CCD refroidies. La faible luminosité de la nébuleuse s’accommode parfaitement de temps de pose unitaire de 600s, 900s voire plus, sans risque de saturation sur l’amas central.
Un ciel transparent et peu turbulent, ainsi qu’une Lune absente en cas d’image LRGB, sont cependant nécessaires pour espérer obtenir un signal satisfaisant et de nombreux détails dans la zone centrale de l’amas ouvert Melotte 15 ainsi que dans les bandes obscures de poussières.
Les utilisateurs de caméra CCD sont – comme souvent – avantagés sur cette cible, notamment avec l’utilisation de la couche Ha qui peut faire office de luminance en tout ou partie (un mélange avec une luminance traditionnelle est aussi possible). La couche Ha permet dans tous les cas de “booster” le rendu d’une image LRGB classique. Cette couche peut être utilisée à la fois pour la luminance mais aussi pour renforcer la couche Rouge. La nébuleuse du Cœur est le parfait exemple d’une nébuleuse pour laquelle une couche Ha constitue un quasi-impératif pour espérer obtenir une image satisfaisante.
Cette cible constitue une cible très prisée des amateurs de SHO, puisqu’elle présente l’avantage d’offrir un niveau de signal significatif dans ces trois longueurs d’onde. Si le Ha est bien sûr prédominant, le OIII et le SII ne sont pas trop en retrait, voire quasiment absent comme cela est le cas sur d’autres objets. Il en résulte une palette de couleurs impressionnante et extrêmement riche au final.
Dans la mesure où le signal est bien présent sur les 3 couches, et si comme moi vous avez plutôt tendance à passer en bin2 pour les couches S et O, il peut être utile ici de faire une exception et d’effectuer l’acquisition en bin1 pour l’ensemble des filtres, et ainsi augmenter le niveau de détails dans l’ensemble des structures. Toutefois, si vous n’envisagez de n’utiliser les couches S et O que pour la couche de chrominance (comme dans l’image présentée ici) vous pouvez opter sans soucis pour une acquisition en bin2.
Autre avantage du narrowband : l’utilisation de filtres restrictifs (par exemple 6nm comme ceux utilisés pour cette image), permettent de photographier cette nébuleuse même en présence de la Lune. Le filtre Ha pourra être utilisé lors des nuits de forte Lune, voire de Pleine Lune (même si cela n’est pas forcément recommandé !), tandis que les filtres OIII et SII pourront être utilisés sans souci jusqu’au premier quartier, voire quelques jours après. Comme le prouve cette image, réalisée lors d’une nuit de quasi-pleine Lune (90%), il est cependant tout à fait possible d’obtenir un résultat correct dans ces conditions peu favorables et ce, avec les 3 filtres S, H et O.
A titre informatif (à nuancer en raison de la bien moindre qualité de la version APN par rapport à la version CCD), voici un petit comparatif des couleurs obtenues entre les versions Ha-RGB (obtenu avec la couche Ha de la version CCD comme luminance et les couches RGB de la version APN comme chrominance) et SHO (l’alignement a été réalisé sur la version CCD-SHO) :
Alors que la version RGB propose une palette de couleurs très réduite, en raison de la prédominance de la couleur rouge de la nébuleuse, la palette de la version SHO est beaucoup plus riche… mais les couleurs ne sont pas « naturelles » ! 🙂
Votre configuration ne vous offre pas assez de champ pour photographier la nébuleuse du cœur dans son ensemble ? Aucun complexe à avoir : n’hésitez pas à faire une plongée dans le centre de celle-ci, en direction de l’amas Melotte 15, de l’extension ouest IC 1795 (« la nébuleuse de la tête de poisson »), ou encore des larges bandes de nuages de gaz qui regorgent de détails…
Les plans resserrés en SHO sur Melotte 15 (« le cœur du cœur ») révèlent toute la complexité et la beauté de cette zone d’active création stellaire.
L’image présentée ici de cette zone consiste uniquement en un détail de l’image principal (avec un traitement spécifique), mais le résultat obtenu avec une plus longue focale offrira des détails beaucoup plus fins.
A signaler également la présence à proximité d’une petite nébuleuse planétaire particulièrement intéressante et esthétique : WeBo1, bien visible avec un filtre OIII.
IC 1805 regorge de zones de nébulosités assez faibles, notamment dans les régions périphériques : la délimitation entre le fond de ciel et la nébuleuse n’est pas clairement marquée. En conséquence, il peut être délicat de distinguer les plus faibles nébulosités du “bruit” photonique dans le fond de ciel, soit en raison d’un ciel affecté par la pollution lumineuse, soit d’un temps de pose insuffisant. Le traitement mis en œuvre doit donc être adapté à ces éventuelles limitations, et être proportionné au signal qu’il est réellement possible de mettre en valeur sur l’image finale.
Comme toujours, une image disposant d’un bon rapport signal sur bruit permet un traitement plus simple et offre de plus nombreuses options.
Une première étape importante est le retrait de gradient ; en particulier pour les images grand champ plus susceptibles d’être affectées par une évolution des zones de pollution lumineuse, du gradient de luminosité provoqué par la Lune, etc. Le plus simple dans ce cas est de se fier aux process de retrait de gradient automatique (tel ABE) qui donnent de bons résultats sous réserve de trouver les paramètres corrects de modélisation du fond de ciel. Si les nébulosités sont trop prises en compte dans cette modélisation, n’hésitez pas à diminuer le degré de polynômes par défaut (par exemple, pour ABE, passez de 4 par défaut à 2, voire 1).
Pour les images intégrant l’ensemble de la nébuleuse, une montée d’histogramme sous Pixinsight avec la fonction MaskedStrech permet d’obtenir des résultats très satisfaisants sur la luminance, en faisant ressortir les plus faibles extensions et assurant une transition douce entre la nébuleuse et le fond de ciel. La difficulté dans ce cas consiste à trouver une zone du ciel totalement dépourvue de nébulosités comme référence du fond de ciel à obtenir après traitement ; la sélection d’une mauvaise zone ne permettant pas d’aboutir à un résultat satisfaisant.
Pour les champs plus resserrés sur Melotte 15, ou au contraire beaucoup plus larges, ou encore dans le cas d’une image avec un signal de moins bonne qualité, une montée d’histogramme classique (avec une première montée logarithmique) donne de très bons résultats : cela permet non seulement de conserver un fond de ciel satisfaisant et moins bruité, mais aussi de préserver l’aspect des étoiles (qui peuvent prendre de l’embonpoint avec la fonction MaskedStrech). Plus d’explications sur cette étape dans le tutoriel dédié.
Dans tous les cas, il est en revanche possible de pousser un peu les détails dans les zones les plus brillantes de la nébuleuse qui présentent un rapport signal sur bruit plus satisfaisant. Il est donc recommander de travailler sur les zones concernées en les isolant au moyen de masques adaptés, afin de localiser les traitements appliqués. Un renforcement des détails, que ce soit sous Pixinsight avec la fonction HDRMultiscaleTransform, ou sous Photoshop au moyen de la fonction d’AstroTools Local Contrast Enhancement, donne de très bons résultats.
Pour en savoir plus sur la mise en œuvre de ces process de rehaussement de détails, je vous invite à consulter le tutoriel dédié à HDRMT, ainsi que le tutoriel plus général consacré à l’amélioration des détails avec Pixinsight, ainsi que le tutoriel spécifique à Photoshop le cas échéant.
Si l’ensemble de la nébuleuse est comprise dans le champ, il est également recommandé de pratiquer une légère réduction d’étoiles, afin de mettre en valeur la nébuleuse elle-même. Ce conseil s’applique de manière plus générale à toutes les nébuleuses situées dans un champ d’étoiles très riche ; comme c’est le cas de celles situées au beau milieu de la Voie Lactée. En revanche, cela est contre-productif pour les plans plus rapprochés sur l’amas Melotte 15.
Avec un APN défiltré, l’équilibre colorimétrique peut s’avérer délicat à obtenir, du fait de la prédominance du signal dans la couche rouge. L’utilisation d’un filtre de type « Skyglow » n’arrange évidemment pas les choses. Avec une CCD, le problème peut également se présenter en cas d’utilisation de la couche Ha comme luminance. Le recours à la fonctionnalité Photometric Color Calibration (PCC) de Pixinsight donne toutefois de bons résultats sur cette zone, du fait de la présence d’étoiles de populations suffisamment variées.
Ce souci est cependant considérablement atténué dans le cas d’image grand champ, car les nuances de couleurs dans les détails des structures sont moins visibles.
Par rapport à la version LRGB, la version SHO ne pose pas les mêmes problèmes, mais reste à mon sens globalement plus simple à traiter.
Premier avantage : la taille des étoiles n’est pas un souci en SHO dès lors que les filtres sont suffisamment restrictifs. Il est donc généralement inutile d’effectuer une réduction d’étoiles sur l’image ; ce qui est un gros point positif dans le cas d’un champ d’étoiles assez riche, comme cela est le cas ici. En revanche, il peut être nécessaire d’effectuer une légère réduction pour harmoniser la taille des étoiles entre les couches S, H et O. La couche Ha présentant les étoiles les plus fines, une légère réduction sur les couches O et S peut éviter d’avoir à gérer de trop forts halos magenta en fin de traitement.
Voici les couches H, O et S obtenues (fonction STF appliquée uniquement sur les brutes issues d’empilement) :
Concernant la calibration des couleurs, celle-ci sera normalement beaucoup plus simple que pour une image RGB, où la prédominance de la couche Rouge peut rendre l’opération assez délicate. Dans le cas d’une image SHO sur cette zone, bien que la couche Ha demeure la plus riche, le signal offert par les autres couches n’est pas négligeable.
Pour l’assemblage des couches, je préconise d’utiliser, en mode linéaire, le process SHO_AIP, très simple d’utilisation, qui permet de mixer directement chaque couche avec de multiples combinaisons et l’application de coefficients différents. Sur cette image, le mixage des couches en mode linéaire s’est révélé infiniment plus simple et rapide à mettre en œuvre que le mixage réalisé (pour l’essai) avec les images en mode non-linéaire. Les nuances obtenues sont beaucoup plus fines et variées, et les halos des étoiles demeurent plus contenus. Au besoin, n’hésitez pas à procéder, préalablement à l’assemblage des couches SHO, à une réduction d’étoile sur les couches S et surtout O ; afin de limiter au maximum l’apparition des halos magentas qui peuvent se révéler source de difficulté dans les étapes ultérieures du traitement.
Sauf à ce que vous soyez adepte de la technique « classique » du SHO (sans luminance), vous pourrez utiliser la couche Ha comme simple couche de luminance. Celle-ci contient l’ensemble des informations et détails utiles. Si vous disposez de couches S et O de grande qualité et réalisées au même niveau de binning, vous pouvez envisager une luminance mixée avec ces trois couches (ou seulement avec les couches H et O).
Dans ce dernier cas, l’outil de création de la couche Luminance du process SHO_AIP fait également merveille ; en particulier en utilisant le mode d’assemblage “lighten” (équivalent à “éclaircir” dans Photoshop) en cas de mix H et O, puisque cette option permet de préserver la couche Ha tout en augmentant le signal dans les seules zones OIII. Avec un réglage correct des coefficients et du mode d’assemblage, il est assez simple d’obtenir une belle image de Luminance. Attention cependant à veiller que le mix ne réduise pas les avantages de la couche Ha en diminuant les détails ou en augmentant significativement le bruit.
Pour ce qui est des couleurs elles-mêmes, il n’existe pas de vérité absolue en SHO. La liberté et la créativité sont beaucoup plus grandes qu’en RGB.
Il existe cependant quelques règles de base :
La palette de couleurs doit être riche, et présenter dès le départ des nuances de rouge, de vert, de bleu, de jaune. Si tel n’est pas le cas, mieux vaut essayer un autre mixage des couches afin d’obtenir un meilleur équilibre. Même si l’outil Correction Sélective de Photoshop donne de bons résultats, la richesse final des couleurs est essentiellement déterminée par les nuances présentes au début du traitement.
Voici une comparaison entre la version initiale, issue de l’application du script AIP_SHO, et la version corrigée après plusieurs passages de « correction sélective » sous Photoshop (avec une correction très préliminaire et incomplète des halos magentas) :
Compte-tenu de la meilleure finesse des étoiles sur la couche Ha, celles-ci présentent habituellement un halo magenta lors de l’assemblage, comme on peut le constater ci-dessus. Il est possible de limiter ce phénomène par une réduction d’étoiles sur les couches S et O, mais pas de l’éliminer totalement. Une désaturation de la couleur magenta permet dans la plupart des cas de corriger la plus grande partie de ce problème. Attention cependant à utiliser un masque d’étoiles lors de cette opération, afin de ne pas diminuer la teinte magenta sur l’ensemble de l’image.
Par ailleurs, l’habitude du traitement RGB conduit souvent à diminuer la présence du “vert” dans l’image. En SHO cependant, cette diminution n’a pas réellement lieu d’être, puisque la couche verte est attribuée au Ha, qui présente le signal le plus présent. Cette réduction excessive du vert conduit souvent à des images d’aspect “bicolore” (HOO), qui offrent beaucoup moins de nuances dans les teintes qu’une palette SHO.
Dans l’image présentée ici, le vert a été “légèrement” réduit, mais pas totalement enlevé : c’est précisément la présence de vert dans l’image qui permet d’obtenir une palette de nuances très variées, notamment dans les zones centrales et plus ténues du « cœur ». A défaut, ces zones ressortent uniformément bleues, entraînant une perte d’informations dommageable.
Plus encore que dans la version RGB, il est conseillé de rehausser les détails dans les zones les plus intéressantes, en particulier dans la zone de nébulosités de Melotte15 et les bandes de poussières les plus obscures. Là encore, l’utilisation de masques adaptés est recommandée afin de localiser au mieux les traitements appliqués. Un renforcement des détails, que ce soit sous Pixinsight avec la fonction HDRMultiscaleTransform, ou sous Photoshop au moyen de la fonction d’AstroTools Local Contrast Enhancement, donne tous deux de très bons résultats dans ce cas.
Pour en savoir plus sur la mise en œuvre de ces process de rehaussement de détails, je vous invite à consulter le tutoriel dédié à HDRMT, ainsi que le tutoriel plus général consacré à l’amélioration des détails avec Pixinsight, ainsi que le tutoriel spécifique à Photoshop le cas échéant.
Concernant le niveau de fond de ciel, celui-ci peut être rehaussé en cas d’image large sur l’ensemble de la nébuleuse (autour de 30/35), afin de mettre en valeur le maximum de détails. Dans le cas d’un plan plus rapproché (telle que l’image présentée ici), il sera possible au contraire d’accentuer un peu plus les contrastes, en laissant le fond de ciel à des valeurs habituellement assez basses (autour de 20/25). Dans tous les vas, les valeurs les plus basses sont à réserver pour les zones les plus sombres des bandes de poussière, afin d’assurer un contraste optimal à l’image.
Pour ce qui concerne la version RGB, celle-ci souffre de multiples défauts évidents, liés d’une part au matériel d’acquisition (champ non totalement corrigé, APN, etc.), à l’acquisition elle-même (temps de pose trop limité), mais aussi à mes compétences en traitement alors balbutiantes à l’époque :
J’aimerais donc réaliser une nouvelle version de cette nébuleuse en couleurs naturelles, en mettant à profit les différentes améliorations intervenues entre temps dans ces différentes causes de limitation ; par exemple avec la Atik16200 sur la TSA102, avec plusieurs heures de poses supplémentaires !
Cette configuration serait également très bonne pour une autre version SHO, mais cette fois-ci intégrale de la nébuleuse.
Une autre image que j’aimerais réaliser est une image grand champ intégrant à la fois la nébuleuse du cœur et celle de l’âme… et pourquoi pas avec le proche double amas de Persée ! (Cela justifierait même l’achat d’un nouvel objectif photo adapté pour cette image !)
Si l’espace commentaires n’est pas accessible, consultez le guide pratique pour y remédier !
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