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Nom : Chaine de Markarian
Type : Galaxies (amas)
Distance : 50/60 millions AL
Taille : 2°
Magnitude : 9/10
Meilleure période d’observation : Printemps
La chaîne de Markarian est un ensemble de galaxies s’étendant sur près de 2°, et appartenant au beaucoup plus vaste amas de la Vierge, distant d’environ 50 millions d’années-lumière.
Elle est nommée ainsi d’après l’astronome arménien Benjamin Markarian, qui le premier a découvert, dans les années 1960, que les galaxies de ce groupe étaient animées d’un mouvement commun.
La chaîne comprend huit galaxies dont M84, M86, NGC 4477, NGC 4473, NGC 4461, NGC 4458, NGC 4438 et NGC 4435.
D’autres galaxies sont également visibles dans cette zone mais ne font pas partie de la « Chaine ». C’est le cas notamment la galaxie supermassive M87, galaxie dominante de l’amas de la Vierge, visible en bas à gauche de cette image.
Galaxie elliptique offrant peu de détails caractérisés (notamment en raison de l’absence de bandes de poussières) M87 renferme en son centre un trou noir supermassif qui constitue l’élément principal de son noyau actif.
Le trou noir de M87 a fait l’objet d’une campagne d’observation spécifique, menée sur plusieurs années par plus de 200 chercheurs. En utilisant 8 radiotélescopes répartis autour du globe et en recombinant leurs différents signaux, la collaboration Event Horizon Telescope a ainsi été en mesure d’obtenir, par interférométrie, la première véritable photographie d’un trou noir !
Le 10 avril 2019, l’EHT a dévoilé cette image historique, parfaitement conforme aux simulations informatiques réalisées selon les prédictions de la théorie de la relativité générale d’Einstein ! Ce trou noir est ainsi situé à 55 millions d’années-lumière environ et doté d’une masse de 6,5 milliards de masses solaire. Cette masse incroyable est concentrée dans un diamètre de 40 milliards de kilomètres, soit à peine 4 fois le diamètre de l’orbite de Pluton !
Sur cette image, le trou noir (matérialisé par son « horizon des événements », qui marque la limite du point de non-retour de son attraction gravitationnelle) ne représente en réalité à peine la moitié du cercle noir central.
Le trou noir en lui-même étant – par définition – inobservable car n’émettant aucun rayonnement, il est seulement visible comme sur cette image par « ombre chinoise » ou au moyen des effets qu’il provoque sur la matière visible environnante.
La prochaine image attendue de la collaboration EHT est celle du trou noir supermassif situé au centre de notre propre galaxie, Sagittarius A*…
Malgré la présence de ce trou noir supermassif et bien que de dimensions considérables (200 fois la masse de notre Voie Lactée), M87 n’est pas particulièrement spectaculaire lorsqu’elle est observée dans le spectre visible.
En revanche, dans d’autres longueurs d’onde, et notamment dans les rayonnements de haute énergie, M87 dévoile un jet de plasma créé par son noyau actif et qui s’étend sur au moins 5 000 années-lumière.
Le trou noir central joue probablement un rôle majeur dans la création de ce jet, dans lequel la matière est projetée à une vitesse proche de celle de la lumière !
A l’instar de M87, les galaxies de la Chaine de Markarian sont pour la plupart également peu spectaculaires car elliptiques, telles M84 et M86. Deux ressortent sans conteste du lot : les galaxies NGC 4435 et NGC 4438, appelées « les Yeux », qui forment un couple de galaxies en interaction gravitationnelle étant probablement entrées en collision il y a plusieurs millions d’années.
Mais c’est bien sûr dans son ensemble que la Chaine de Markarian se révèle extraordinaire à observer et à photographier. Avec un temps de pose conséquent, le fond de ciel fourmille alors d’innombrables galaxies plus lointaines. De manière plus générale, les constellations de la Vierge et de la Chevelure de Bérénice offrent une richesse et un foisonnement d’objets incomparables dans le ciel du printemps.
Cette image a été réalisée avec la TSA102 et un APN au format APS-C, le tout avec un temps de pose limité (2h au total).
Une faible focale est non seulement nécessaire pour saisir l’ensemble de la Chaine qui s’étend sur près de 2°, mais ne constitue en outre pas un handicap dans la mesure où la majorité des galaxies du champ ne présentent que peu de détails de surface. Les « yeux » constituent une exception notable, mais leur détails ne se révèlent qu’avec une focale bien plus élevée. La galaxie M87 rentre juste dans le champ, au prix d’un léger décentrage de la chaine elle-même.
Le temps de pose est suffisant pour limiter la montée de bruit dans le fond de ciel, mais en revanche trop limité pour mettre en valeur les plus faibles extensions des galaxies.
Au final, l’image est « honorable » pour un APN, mais bien sûr bien en-deça de ce qu’il est possible de réaliser avec une caméra astro !
Matériel :
Takahashi TSA102 f/6
AZEQ6 via EQmod
Canon 1100D Astrodon (800iso)
Guidage : lunette-guide 9×50 et PLA-MX
Pixinsight
Acquisition :
25 x 300s
Intégration totale : 2h05
Date(s) de prise de vue : 22 avril 2015
La Chaine de Markarian est assez peu souvent photographiée dans son ensemble, alors qu’elle offre pourtant une mise en abime exceptionnelle… il s’agit en effet d’une cible réputée difficile.
Cet ensemble de galaxies présente en effet des particularités qui promettent un défi relevé avant même de commencer les acquisitions : il est à la fois étendu (plus de 2°) et composé d’objets pour la plupart très petits, en dehors de quelques grandes galaxies…
Pour tenter de concilier au mieux ces contraintes, il est donc recommandé de disposer d’un instrument de grand diamètre et très lumineux (f/4 ou inférieur), mais offrant cependant une focale suffisante pour ne pas réduire la chaine à un ensemble informe de « tachouilles » mal résolues.
Une focale comprise entre 800mm et 1000mm constitue probablement le meilleur compromis pour photographier la chaine dans son ensemble en obtenant un niveau de détails suffisant ; à condition toutefois de disposer d’un capteur de format assez grand (format APS-C ou 16200 minimum).
Veillez également à conserver un échantillonnage correct (entre 1″ et 1,5″/px) afin de pouvoir saisir au mieux les quelques détails présents sur les plus grandes galaxies.
Pour les acquisitions, la plupart des petits objets étant de faible luminosité, il est bien entendu recommandé de privilégier des nuits sans Lune et avec un ciel parfaitement transparent, afin d’optimiser la détectivité dans le fond de ciel et d’éviter tout halo. A défaut, non seulement moins de petites galaxies seront bien visibles, mais cela compliquera également la tâche au traitement. Naturellement, évitez à tout prix un ciel pollué ; l’utilisation de filtres anti-pollution lumineuse étant déconseillé pour ce type de cibles à spectre continu (du moins avec une caméra couleur ; l’équilibre colorimétrique pouvant ensuite être compliqué à obtenir au traitement).
Dans la même logique, les meilleurs mois pour photographier cet objet sont mars et avril ; période où l’objet est le plus longtemps visible au cours de la nuit, passe au méridien à une heure intéressante (permettant les acquisitions avant et après ce passage), et permet de réaliser le plus de poses avec l’objet au plus haut dans le ciel (un peu moins de 60° à Paris). N’oubliez pas que plus l’objet est haut dans le ciel, plus la couche d’atmosphère traversée est fine, et plus la transparence est bonne (et le plus souvent la turbulence). Ces quelques détails peuvent vraiment faire la différence entre une image moyenne et une bonne image sur ce type d’objets…
Comme pour tous les objets, il est fortement recommandé d’anticiper ses sessions d’observation, à l’aide de logiciels tels que Stellarium, Carte du Ciel ou Astromatos. Les utilisateurs de logiciels d’automatisation de session tels que SGP ou NINA peuvent également trouver toutes les informations utiles dans les utilitaires de cadrage et les bases de données de ces outils.
Sur cette cible, il est bien sûr recommandé de consacrer un temps global conséquent aux acquisitions, et ce pour l’ensemble des couches. A défaut, la gestion du bruit lors de la montée d’histogramme peut être délicate, et limiter dans certains cas la possibilité de tirer sur les curseurs… avec une image trop sombre au final. A cette fin, ne prévoyez pas de réaliser une image de la chaine de Markarian sur une seule nuit (surtout aux mois d’avril ou mai où les nuits sont déjà assez courtes…).
La Luminance est bien sûr essentielle : n’hésitez pas à augmenter fortement vos temps de pose unitaire (600s ou 900s voire plus selon la qualité de votre ciel). Si votre site est relativement pollué, vous pouvez utiliser un filtre CLS en lieu et place de votre filtre L habituel. Prévoyez cependant dans ce cas d’augmenter le temps de pose global d’au moins 25%. Il sera nécessaire de consacrer au minimum quelques heures à la couche de luminance pour optimiser la détectivité des petites galaxies perdues dans le fond de ciel (4h semble un minimum avec une optique moyennement ouverte et une caméra CCD à la sensibilité standard). Bien sûr, si vous avez la possibilité de poser plus longtemps, ne vous en privez pas !
Dans tous les cas, le temps consacré à la luminance ne doit pas se faire au détriment de la couche couleur : les petites galaxies étant de faible luminosité, il est nécessaire de prévoir un temps de pose conséquent également pour la couleur. A défaut, l’image finale risque d’être assez terne…
Pour optimiser le temps d’acquisition, il est cependant parfaitement possible de recourir si besoin au binning pour la réalisation des couches RGB.
Réaliser une bonne image de cet ensemble nécessite en outre de disposer d’un champ bien plan, en particulier si certaines galaxies sont proches de la bordure du champ. C’est la raison pour laquelle j’avais choisi de réaliser cette image avec la TSA et non avec une lunette de plus courte focale (66/400) disposant d’un champ plus large mais moins bien corrigé.
Le meilleur cadrage consiste à placer la chaine dans la diagonale du capteur, ce qui donne un résultat très esthétique. Il est même recommandé d’orienter la chaine davantage dans la diagonale que sur la photo présentée. Tout dépend si vous souhaitez inclure M87 dans le champ ou non.
Si vous disposez d’un capteur plus grand que le APS-C (16200 ou full frame) et que votre focale ne dépasse pas 600mm, vous pouvez même inclure dans le champ la galaxie M88 (en haut à gauche de l’image ci-contre), mais cela implique de décaler un peu l’ensemble de la chaine… à voir !
A noter que compte-tenu de la grande concentration de galaxies dans cette zone, il est possible de réaliser une image grand champ fourmillant véritablement d’univers-iles aux formes et aux couleurs très variés, offrant un résultat vraiment spectaculaire. Les galaxies M98, M99, M100, M89, M90, voire même jusqu’à M64, peuvent ainsi être photographiées dans le même champ ; comme dans ce magnifique cliché de Rogelio Bernial Andreo.
N’oubliez pas que les principales difficultés sur cet objet se posent lors de l’acquisition… d’où la nécessité de s’appliquer au maximum pour cette phase !
Portez également une attention particulière à la réalisation de flats corrects : dans la mesure où le but du traitement va notamment consister à mettre en valeur des objets très faibles, votre image de luminance doit comporter le moins de défauts d’uniformité possible à l’issue du prétraitement. Ainsi, la présence de « traces » de flats (sur-correction, sous-correction ou encore traces de poussières) va obliger à abaisser le niveau du fond de ciel pour masquer ces défauts ; ce qui peut conduire à devoir masquer également certaines galaxies faiblement lumineuses…
Cet aspect est moins problématique cependant pour les couches couleur RGB.
Avec une CCD, il est recommandé de consacrer un temps plus long de coutume aux couches RGB. Les images présentant des couleurs réellement prononcées de la Chaine de Markarian sont en effet assez rares, et obtenir une telle image constitue en soi un vrai challenge !
Comme évoqué ci-dessus, il est indispensable d’obtenir des images bien calibrées pour espérer pouvoir traiter au mieux ce champ !
Si vous constatez des défauts potentiellement gênants à l’issue de la calibration des images brutes sur votre image de Luminance, n’hésitez pas à procéder à un tri méticuleux de vos brutes afin d’écarter celles où les défauts sont les plus visibles. Dans tous les cas, l’essentiel est de terminer le prétraitement avec une image de base avec le fond de ciel le plus propre possible.
Pour le traitement lui-même, la seule phase un peu délicate est celle de la montée d’histogramme. Je vous conseille de réaliser différents essais, tant avec une méthode classique (log + curseurs) qu’avec une méthode permettant de relever les valeurs basses de l’image (MaskedStretch par exemple) afin d’optimiser la visibilité des galaxies les plus faibles. Attention toutefois, si votre fond de ciel n’est pas parfaitement propre, cette seconde méthode ne donnera pas de bons résultats…
Vous pouvez ensuite retenir l’image de luminance la plus probante : la montée classique assurera un meilleur contraste (toujours utile sur ce type de cibles) mais au détriment de la visibilité des galaxies les plus faibles ; tandis que la montée optimisée présentera des avantages inverses, tout en étalant un peu plus les étoiles… Un mixage des deux images est bien sûr possible pour trouver un compromis optimal.
Un réglage important est également la définition du point noir de l’image, qui va déterminer le niveau du fond de ciel. Tout dépend alors de la qualité de votre image, l’idéal étant de pouvoir conserver un fond de ciel suffisamment sombre (entre 15 et 20 sur une image 8 bits) sans sacrifier la visibilité des galaxies les plus faibles, afin d’assurer à la fois un contraste correct à l’image et un effet de foisonnement en faisant apparaitre le maximum de « petites tachouilles » galactiques sur l’image.
Un point de vigilance pour cette phase de montée d’histogramme et de réglage du niveau du fond de ciel est d’assurer un bon équilibre de luminosité entre les grandes galaxies plus lumineuses et les plus petites galaxies en arrière-plan. Ne sacrifiez pas l’une de ces deux catégories d’objet au détriment de l’autre…
A noter également qu’une montée d’histogramme trop appuyée peut altérer fortement l’aspect des étoiles. Il n’est toutefois pas trop gênant sur cette cible que les étoiles prennent un peu d’embonpoint, mais demeurez vigilant sur cet aspect et veillez à conserver leur aspect « gaussien » (centre plus lumineux que les bords et décroissance progressive de la luminosité) !
Vous pouvez au besoin vous permettre d’effectuer une réduction du bruit un peu plus poussée qu’à l’accoutumée sur le fond de ciel, sans exagération toutefois afin de ne pas donner à ce dernier un aspect artificiel (utilisez un masque de luminosité inversé pour appliquer ce process).
Le recours aux process de rehaussement des détails ou HDR sont en revanche largement inutiles, voire contre-productifs, sur cette image.
Pour la couche couleur, la montée d’histogramme en mode MaskedStretch est recommandée, afin d’obtenir toute l’information utile lors de l’assemblage de l’image en mode LRGB.
Pour la calibration des couleurs, le plus simple est de recourir au process PhotometricColorCalibration (PCC) de Pixinsight, qui donnera de très bons résultats, sous réserve que suffisamment d’étoiles de référence soient visibles sur votre image.
Si votre champ est trop réduit ou si trop peu d’étoiles de référence sont identifiée, ce process donnera des résultats incorrects (une trentaine d’étoiles de référence est un minimum pour que celui-ci fonctionne correctement).
Bien que la plupart des galaxies du champ soient elliptiques, privilégiez malgré tout la référence par défaut (« spiral average galaxy« ), qui donne de bons résultats.
Si le résultat obtenu avec PCC n’est pas satisfaisant, il est recommandé de procéder à la calibration des couleurs de manière classique.
A noter que vous pouvez effectuer une réduction de bruit appuyée sur cette image couleurs, et fortement flouter la couche Couleur avant son assemblage avec la couche de Luminance afin de réduire encore un peu plus le bruit chromatique sur l’image finale.
L’assemblage LRGB ne pose pas de difficultés particulières. A l l’issue de cet assemblage, vous pouvez vous permettre d’appuyer un peu plus la saturation des couleurs, celle-ci étant par défaut assez faible sur les galaxies de ce champ.
Une attention particulière à la gestion du bruit et à la mise en valeur des couleurs est importante pour obtenir une image finale à la hauteur de cet objet.
Un meilleur cadrage, davantage centré sur la Chaine de Markarian, serait retenu. Quitte à ne pas inclure M87 sur le cliché. Le spectacle offert par la Chaine se suffit en effet largement à lui-même.
Un temps de pose plus long serait naturellement de mise… notamment pour les couches couleurs à la CCD afin d’obtenir une image finale plus riche.
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