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Traitement : | |
Intérêt SHO : | |
Popularité : |
Nom : NGC 7023 – Nébuleuse de l’Iris
Type : Nébuleuse par réflexion
Distance : 1300 AL
Taille : 18′ x 18′ (6 AL)
Magnitude : 6,8
Meilleure période d’observation : Automne
La nébuleuse de l’Iris, située à 1300 années-lumière dans la constellation de Céphée, constitue l’un des plus beaux exemples de nébuleuse par réflexion accessible aux amateurs.
La très grande majorité des nébuleuses qu’il est possible d’observer et de photographier sont des nébuleuses par émission, c’est à dire des grands nuages de gaz ionisés par le rayonnement des étoiles proches, qui réémettent leur propre lumière dans le rouge (plus précisément dans la raie Ha de l’hydrogène).
Les nébuleuses par réflexion ne résultent pas du même mécanisme physique : le rayonnement n’est pas assez énergétique pour ioniser les atomes du nuage, et la lumière est simplement diffusée par réflexion. L’angle de la réflexion subie par la lumière est différente selon la taille des molécules du nuage et la longueur d’onde de la lumière incidente : les plus courtes longueurs d’onde sont davantage diffusées, ce qui explique la couleur bleue de ces nébuleuses (c’est d’ailleurs le même mécanisme qui explique pourquoi le ciel est bleu sur Terre).
La région centrale (bleutée) s’étend sur plus de 6 années-lumière. Cependant, les nuages de gaz et de poussière qui l’environnent sont de dimensions beaucoup plus importantes. A tel point que, quelles que soient la focale utilisée et la taille de votre capteur, le champ sera nécessairement parsemé de ces nébuleuses obscures, sur plusieurs degrés !
La région de la nébuleuse bleutée correspond à un (heureux) point de rencontre entre un nuage assez dense et une étoile suffisamment brillante pour provoquer cette réflexion ; en l’occurrence l’étoile SAO 19158, de magnitude 7… et également d’un bon angle de vue depuis notre système !
Cette image a été réalisée avec une TSA 102 à f/6 (avec le réducteur) et la CCD AtikOne 6, début août 2016, sur 2 nuits.
Il s’agit de l’une de mes premières acquisitions à la CCD. J’avais en effet toujours eu envie de photographier cette nébuleuse depuis mes débuts en astrophoto, mais je m’étais « interdit » de la tenter à l’APN, car j’étais convaincu que je ne pourrais pas tirer grand chose d’intéressant ni bien faire ressortir les nuages alentours. Bien que sa situation dans le ciel ne soit pas idéale au début du mois d’août, j’ai quand même décidé de la tenter avec la CCD, quitte à étaler les acquisitions sur plusieurs nuits.
Compte-tenu de la pollution lumineuse depuis mon site d’observation, je n’ai pas utilisé le filtre L classique mais un filtre CLS-CCD, plus restrictif, afin de limiter les dégâts sur le fond de ciel.
Ce type de filtres « anti pollution lumineuse » assure une bonne transmission des longueurs d’onde importantes (Ha notamment), tout en rejetant les raies les plus usuelles associées aux éclairages publics (la raie du sodium par exemple). Même si l’arrivée des LEDs dans les éclairages publics les rends moins efficaces (car de spectre continu), ils permettent de gagner en contraste sur les objets du ciel profond tout en limitant la montée du niveau de fond de ciel.
L’intérêt de leur usage dépend cependant du type de cible : bénéfique pour les nébuleuses en émission, moins pour les nébuleuses par réflexion, et assez dommageables pour les objets à spectre continu telles que les galaxies. Leur utilisation entraine également une perte de luminosité globale qu’il faut compenser par un temps de pose plus important (que j’estime personnellement entre 25% et 40%). Pour les filtres les plus sélectifs, l’équilibre des couleurs peut également être sévèrement faussé, ce qu’il appartient de corriger lors du traitement.
Sur cette image, je pense avoir fait le bon choix, car à défaut les nuages obscurs auraient été beaucoup plus difficiles à faire ressortir du fond de ciel.
J’ai également procédé à une série de poses plus courtes en luminance en prévision d’une éventuelle nécessité de désaturer la luminosité au centre de la nébuleuse, à proximité de l’étoile de magnitude 7. Cependant, cela s’est avéré inutile au traitement ; la zone autour de l’étoile n’étant pas spécialement saturée.
Malgré les presque 6h de pose au total, il n’y a pas de miracle : le bruit monte rapidement et il est difficile de bien faire ressortir les nuages sombres avec un tel temps de pose. J’ai donc été contraint de « lisser » un peu plus que d’habitude le fond de ciel et les nuages sombres pour conserver un bruit acceptable visuellement.
Matériel :
Takahashi TSA102 f/6
AZEQ6 via EQmod
AtikOne6 (-10°)
Guidage : OAG & Atik GP
Filtres Astronomik LRGB
Pixinsight – Photoshop
Acquisition :
L (CLS-CCD) : 36 x 300s bin1
L (CLS-CCD) : 12 x 30s bin1
R : 15x 180s bin2
G : 15 x 180s bin2
B : 20 x 180s bin2
Intégration totale : 5h36
Date(s) de prise de vue : 7 & 10 août 2016
Le magazine « L’Astronomie » m’a contacté pour utiliser cette photo pour illustrer un article sur Céphée dans le numéro d’octobre 2017 :
C’est toujours satisfaisant de voir son travail valorisé et servir d’illustration à un article dédié à l’objet photographié ! 🙂
Un ciel bien noir et transparent est un atout majeur pour pouvoir faire ressortir les nuages de poussières du fond de ciel lors du traitement. Compte-tenu de sa position très boréale, la nébuleuse de l’Iris ne monte jamais très haut dans le ciel. Il est donc important de privilégier son passage au méridien pour réaliser les acquisitions, quitte à étaler celles-ci sur plusieurs nuits afin de privilégier une transparence maximale.
Ces recommandations sont encore plus essentielles si vous souhaitez réaliser un gros plan de la nébuleuse et mettre en valeur ses très nombreux détails à l’aide d’une focale plus conséquente. Dans ce cas, veillez à porter une attention particulière à la saturation que peut provoquer la brillante étoile de magnitude 7 au centre de la nébuleuse : en cas de pose unitaire trop longue, le risque est un étalement de sa lumière sur la nébuleuse, avec une perte de détails. Si besoin, il est nécessaire alors de diminuer le temps de pose unitaire, en compensant par un plus grand nombre de poses.
Si le champ que vous envisagez est beaucoup plus large, cet aspect est moins essentiel, mais en cas de saturation excessive, la réalisation d’une série de poses plus courtes doit être envisagée afin de réaliser un mix en HDR lors du traitement. Il est alors possible de privilégier un temps de pose unitaire allongé afin de saisir au mieux les nuages sombres aux alentours de la nébuleuse.
Quel que soit le champ envisagé, le véritable défi est bien de faire ressortir et de mettre en valeur ces bandes sombres. Quel que soit le soin apporté à la prise de vue, l’élément le plus limitant restera malgré tout la qualité du ciel. Vous pouvez cependant mettre le maximum d’atouts de votre côté en privilégiant le passage au méridien, en utilisant un filtre CLS en cas de pollution lumineuse trop préjudiciable, en utilisant une CCD plutôt qu’un APN…
Un APN, même non défiltré, est parfaitement utilisable pour photographier cet objet, en raison de la sensibilité importante de ces capteurs à la lumière bleue. Toutefois, une CCD monochrome conserve deux avantages fondamentaux : une résolution bien supérieure (100% des pixels sensibles au bleu, contre seulement 25% dans le cas d’un APN équipé d’une matrice de Bayer), et surtout un refroidissement et une régulation thermique qui permet de diminuer considérablement le bruit, ce qui est essentiel pour faire ressortir correctement les nuages sombres du fond de ciel.
Bien sûr, il est toujours possible de se lancer dans l’aventure avec un simple APN ; à condition de prévoir d’y passer plusieurs nuits et de réaliser un temps de pose de plus de 10 ou 20h… pour obtenir finalement un moins bon résultat qu’en quelques heures avec une CCD. C’est pour cette raison que cet objet figurait sur ma liste de ceux à faire uniquement « une fois la CCD achetée » ! 🙂
En cas d’utilisation d’un filtre anti pollution lumineuse (UHC, CLS, etc.), prévoyez une augmentation significative du temps de pose unitaire et/ou global (de 25% à 40% environ), que ce soit à l’APN ou à la CCD.
Côté couleurs, une bonne couche RGB est bien sûr indispensable pour un résultat qui soit à la hauteur de cette magnifique nébuleuse. La couche Bleue est naturellement fondamentale, mais également la couche Rouge, qui va permettre d’obtenir des colorations subtiles de teinte marron/beige dans les bandes de poussières.
Attention, cette cible ne se prête absolument pas au SHO !! 🙂
L’utilisation d’une courte focale et d’un grand capteur permet de capturer un champ incroyablement riche en nébuleuses obscures autour de l’Iris. La réalisation d’une mosaïque est bien sûr possible, mais beaucoup plus complexe dans ce cas précisé compte-tenu de la grande richesse du fond de ciel, du temps de pose à envisager par tuile, et de la difficulté de retrouver des conditions de qualité de ciel suffisamment proches entre les acquisitions permettant un assemblage correct au final.
Cette image présente une très large palette d’intensités lumineuses : de la très brillante étoile centrale aux sombres bandes de poussières, en passant par tous les dégradés de la nébuleuse elle-même.
La principale difficulté du traitement – et qui doit rester une priorité à toutes les étapes de celui-ci – est donc la gestion de la dynamique globale de l’image. Il est complexe de faire ressortir les très basses valeurs, qui émergent à peine du fond de ciel (les bandes sombres) tout en évitant la saturation dans les zones lumineuses.
Deux techniques sont possibles pour cette gestion de la dynamique qui va intervenir essentiellement lors de la montée d’histogramme :
Même si j’ai employé la première technique lors du traitement de cette image, la seconde méthode me semble bien plus adaptée. En effet, même si elle implique tout de même de recourir ensuite à des traitements localisés (courbes avec masques adaptés) sur les différentes zones, il s’agit plus de petites retouches que de traitements plus lourds et importants comme dans le cas de la première méthode, qui peuvent rapidement donner lieu à des transitions brutales dans les différentes zones et à une obligation de lisser fortement l’image dans les basses valeurs.
Attention cependant, le recours à la fonction MaskedStretch altère l’aspect des étoiles, qui prennent beaucoup plus d’embonpoint qu’avec une montée d’histogramme classique. Un avantage est cependant que les étoiles ne sont pas saturées, y compris au centre, contrairement à une montée normale. Sur ce type de champ, les avantages l’emportent cependant sur les inconvénients puisque même avec une montée d’histogramme classique, l’aspect des étoiles est très compliqué à gérer – comme le prouve la présente image dont les étoiles constituent l’un des principaux défauts.
Il est ensuite possible de traiter de manière localisée la dynamique au sein de la seule nébuleuse, afin de mettre en valeur le plus de détails possibles.
Si la saturation dans cette zone est réelle sur l’image linéaire (avant montée d’histogramme), les détails sont définitivement perdus et aucun traitement ne pourra les faire apparaitre ! Cela peut résulter d’un temps de pose unitaire trop long ou d’une absence d’anti-blooming du capteur. Dans ce cas, qu’il faut anticiper lors de la prise de vue, il est nécessaire de recourir à une série de poses courtes afin de mixer les deux images lors du traitement grâce à la fonction HDRComposition, afin de réintégrer les détails dans l’image poses longues.
Une fois ce mixage réalisé, ou en l’absence de saturation du capteur, les fonctions classiques telles que HDRMultiscaleTransform donnent généralement de très bons résultats. Il est nécessaire d’appliquer cette fonction avec une protection des autres zones de l’image au moyen d’un masque adapté et progressif, réalisé par exemple avec RangeSelection, tout en excluant les étoiles (l’image obtenue avec StarMask peut être soustraite à cette fin de l’image obtenue avec RangeSelection, par l’outil PixelMath ; avec application éventuelle d’un flou gaussien afin d’optimiser la progressivité du masque). Dans tous les cas, il est nécessaire de cocher en plus l’option « Lightness Mask » dans la boite de process HDRMultiscaleTransform afin d’optimiser la protection de l’image.
Si la dynamique de la nébuleuse est trop affectée, il est possible de mixer l’image « normale » avec l’image « HDR », en leur affectant des coefficients distincts sous PixelMath.
Il est également possible de conclure le traitement avec une correction appropriée (mais délicate à gérer) des étoiles si l’aspect de celles-ci a été trop altéré, avec l’outil MorphologicalTransformation et un masque d’étoiles adapté. Une petite réduction d’étoiles est également possible.
Enfin, je vous recommande de procéder à la calibration des couleurs par la technique traditionnelle en 2 étapes – neutralisation du fond de ciel et calibration des couleurs – plutôt que par le process PhotometricColor Calibration (PCC) de Pixinsight ; la présence de poussières rougissant les étoiles dans tout le champ ne permettant pas une bonne mise en œuvre de ce process (basé sur les couleurs des étoiles).
J’aimerais refaire cette cible avec un temps de pose beaucoup plus conséquent, de l’ordre de 15 ou 20h, afin de mieux faire ressortir les nuages sombres.
Toutefois, j’aime suffisamment cette image pour m’en contenter un petit moment… cette nébuleuse ne figure donc pas sur ma liste de cibles prioritaires à refaire ! 🙂
Sur l’image proprement dite, un second traitement, en maitrisant mieux les différents process, permettrait surement d’améliorer le résultat final. En particulier sur l’aspect des étoiles, la gestion du bruit, le lissage des basses fréquences et la finesse des détails dans le centre de la nébuleuse. Sur les couleurs en revanche, je suis très satisfait de l’équilibre obtenu.
Si l’espace commentaires n’est pas accessible, consultez le guide pratique pour y remédier !
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