
Photons d’Or – Mai 2023
L’image du mois Mai 2023 Les galaxies NGC 4725, NGC 4747 & NGC 4712, par Guillaume GRUNTZ. Parmi les belles galaxies du printemps, NGC 4725 n’est pas l’une des plus populaires… et l’on se demande vraiment pourquoi ! Elle n’a
Si l’on évoque « supernova » et « constellation du Taureau », il y a fort à parier que vous pensiez spontanément au premier objet du catalogue Messier, la célèbre « nébuleuse du Crabe » dont l’explosion a été observée au matin du 4 juillet de l’an 1054.
Pourtant, il existe dans cette zone du ciel un autre rémanent de supernova beaucoup plus discret, désigné sous le nom moins poétique de Simeis 147.
Bien qu’elle soit deux fois plus proche de nous, sa discrétion s’explique par son âge : plus de 30 000 ans.
3000 siècles pendant lesquels la matière expulsée par l’étoile mourante s’est lentement dissipée dans l’espace environnant, pour former aujourd’hui un gigantesque et ténu réseau de filaments torsadés et entremêlés.
Ainsi, ce qui constituait auparavant la majeure partie de la matière de l’étoile s’étend désormais sous la forme d’une bulle d’environ 120 années-lumière de diamètre, soit une dimension apparente dans le ciel de plus de 6 fois la pleine Lune.
Or, plus ces rémanents s’étendent – à une vitesse de 1000km/s – plus leur densité diminue, ce qui conduit, lentement mais inexorablement à une baisse d’intensité lumineuse et, à plus longue échéance, à leur disparition totale.
Découvert en 1952, Simeis 147 n’a été reconnu comme un rémanent de supernova qu’en 1968 ; mais son étude plus complète a été encouragée à partir de 1996 lorsqu’un pulsar « candidat » a été identifié à proximité du centre de la nébuleuse. Or, à cette époque (et encore aujourd’hui), les pulsars associés à des rémanents visibles sont très minoritaires et suscitent beaucoup d’intérêt chez les professionnels qui cherchent à mieux comprendre les mécanismes à l’œuvre lors de l’explosion des supernovæ.
Le pulsar en question, qui constituerait le dernier résidu de l’étoile ayant explosée, est extrêmement massif, fortement magnétisé et en rotation rapide sur lui-même (8 rotations par seconde !).
Si une étude a déterminé un mouvement propre du pulsar (385m/s) compatible avec un emplacement initial au centre du rémanent, l’association physique entre le rémanent et le pulsar reste sujet à controverse parmi les astronomes.
En effet, la mesure de la vitesse propre du pulsar conduit à déterminer l’âge de formation du rémanent, en supposant que l’explosion de la supernova a eu lieu lorsque le pulsar se trouvait au centre de celui-ci. La valeur de 30 000 ans, ainsi obtenue, s’écarte toutefois très significativement de « l’âge caractéristique » du pulsar (qui constitue une estimation théorique de l’âge d’un pulsar par la mesure du ralentissement de sa période de rotation), qui est quant à lui estimé à… 600 000 ans, soit 20 fois plus que l’âge estimé d’après son déplacement !
Un tel écart n’est toutefois pas rédhibitoire, dans la mesure où le calcul de l’âge caractéristique d’un pulsar présuppose quelques caractéristiques physiques qui ne sont pas toujours remplies (notamment que le rayonnement du pulsar soit dipolaire, ce qui n’est pas le cas par exemple du pulsar du Crabe) et que les écarts mesurés sur d’autres pulsars présentent parfois des différences aussi notables.
Ainsi, l’âge caractéristique du pulsar associé à la nébuleuse 3C 58 est de 5400 ans, alors que son âge réel est de 841 ans… ce dernier étant connu avec certitude, puisque l’explosion de l’étoile a été observée, en Chine notamment, en 1181.
De fait, la méthode de l’âge caractéristique donne conduit très souvent à surestimer l’âge réel d’un pulsar, en particulier pour les pulsars récents pour lesquels la période initiale de rotation estimée ne diffère que très faiblement avec la période actuelle de rotation effectivement mesurée.
Dans un tel cas de figure, une incertitude de mesure de quelques micro-secondes dans la période de rotation, ou une estimation incertaine de la période initiale, peuvent en effet conduire à des incertitudes très élevées quant à l’estimation de l’âge du pulsar.
Malgré ces résultats cohérents avec les observations, il n’y a donc pas encore de certitude à ce jour sur le fait que ce pulsar et les rémanents soient liés physiquement, et il n’est pas exclu qu’un autre pulsar aux propriétés plus compatibles puisse être découvert à l’avenir (comme dans le cas de la nébuleuse 3C 58 citée ci-dessus, dont le pulsar historiquement associé et découvert en 2002 a finalement été « déclassé » en 2021 à la suite de la découverte d’un autre pulsar candidat plus crédible).
Objet réputé difficile, Simeis 147 présente une très faible luminosité de surface qui implique de très longs temps de pose pour se dévoiler. L’avènement des capteurs CMOS, malgré leur sensibilité élevée et leur faible bruit de lecture, ne change pas radicalement la donne : cette nébuleuse demeure toujours une cible réservée aux amateurs avancés, à même d’exploiter le signal limité obtenu.
Le narrowband, ou a minima une couche Ha en complément des images RGB, s’avère indispensable en pratique.
Les grandes dimensions apparentes de cette nébuleuse impliquent par ailleurs de disposer d’un capteur assez grand et d’une focale courte… Un téléobjectif de 200 à 300mm constitue souvent l’instrument de prédilection pour la photographier.
Outre des temps de pose à rallonge, un ciel transparent et dénué de pollution lumineuse constitue un allié précieux pour faire ressortir les filaments ténus du fond de ciel.
C’est en raison de ce dernier point que la réalisation de cette photographie s’est transformée en véritable « parcours du combattant » pour Yann Sainty, qui n’a pas hésité à effectuer plus de 3600km au total pour chasser, entre les Vosges et la Provence, un ciel de qualité suffisante pour réaliser les acquisitions, qui se sont étalées sur 14 nuits sur 3 mois (et parfois en changeant de lieu d’un soir à l’autre au gré des conditions météo…) !
Une ténacité qui force le respect, d’autant plus que les conditions étaient rarement clémentes, entre les températures négatives et les bans de brouillard dont l’arrivée impromptue a le don de mettre les nerfs des plus patients à rude épreuve ! Mais après 55h d’acquisition au total, l’objectif était rempli… du moins, en partie, car il restait encore à assembler et à traiter la mosaïque des deux images ainsi réalisées !
Le traitement en lui-même est parfaitement exécuté, avec une belle mise en valeur du signal et des détails dans les filaments, un équilibre des couleurs très agréable, ainsi qu’une bonne gestion du bruit et des étoiles auxquelles les couches RGB viennent redonner des teintes naturelles. L’assemblage des 2 images de la mosaïque, ainsi que le mixage en HOO et la réintroduction des étoiles sur les versions starless, sont par ailleurs totalement maitrisés.
Au-delà de l’image elle-même qui est véritablement superbe, on ne peut que s’incliner devant la persévérance et l’abnégation dont Yann a fait preuve pour mener à bien cet ambitieux projet. On a parfois tendance à oublier, une fois le résultat achevé, tous les efforts réalisés et les difficultés rencontrées pour y parvenir… mais gageons que, dans le cas présent, cette réalisation demeurera pour Yann une expérience inoubliable qui contribuera à magnifier encore un peu plus le résultat final !
Après avoir débuté il y a 2 ans avec un Newton 150/750 sur Eq3-2 (« la meilleure école d’astrophoto pour apprendre la patience et la précision »), Yann a rapidement fait évoluer son setup afin d’améliorer ses résultats.
L’acquisition récente d’une FSQ-106, associée à une caméra 2600MC, lui permet aujourd’hui de réaliser de superbes images tant sur des objets du ciel profond que sur des panoramas plus larges du ciel puisque (comme le montre l’image présentée ce mois-ci), Yann n’hésite pas à se lancer dans d’ambitieux projets de mosaïques !
Accordant une grande importance à la phase de traitement, Yann y consacre de très nombreuses heures afin de fignoler les réglages et d’obtenir les résultats les plus satisfaisants, comme le prouve encore une fois cette image.
Adepte du travail collaboratif, Yann est également membre de la Team « Stellae Orientis » qui réalise de magnifiques photos !
Une visite de sa galerie Astrobin est indispensable pour tout amateur de belles images astro !
Date : 10 novembre 2021 – 3 janvier 2022 (14 nuits)
Lieu : Vosges & Provence (France)
Optique : Takahashi FSQ-106
Monture : SW EQ6R Pro
Caméra : ZWO ASI 2600 MC
Filtres : Antlia 3nm + RGB
Mosaïque : 2 images
Ha : 165 x 600s (bin1)
OIII : 156 x 600s (bin1)
RGB : 180 x 10s (bin1)
Total : 54h
Traitement : Pixinsight, Photoshop & Siril
Les Photons d’Or récompensent chaque mois une image particulièrement remarquable réalisée par un amateur… n’hésitez pas à proposer vos images !
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