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Nom : NGC 869 – NGC 884 – « Double amas de Persée »
Type : Amas ouverts
Distance : 7500 AL
Taille : 60′
Magnitude : 3,7 / 3,8
Meilleure période d’observation : Automne
Le « double amas » de Persée est sans conteste l’un des plus beaux amas du ciel boréal, déjà catalogué par Hipparque en -130 avant notre ère.
Parfaitement perceptible à l’œil nu, sous la forme d’une « étoile nébuleuse », sa structure et sa richesse se révèle parfaitement avec une simple paire de jumelle.
Ses deux composantes, NGC 884 et NGC 869, sont issues de l’effondrement du même nuage interstellaire : la proximité de ces deux amas n’est donc pas qu’apparente puisque « seulement » 1000 années-lumière les séparent.
Bien que nés dans la même « pouponnière », les deux amas présentent toutefois quelques différences notables.
La première est leur âge : alors que NGC884 s’est formé il y a 6 millions d’années, NGC869 est deux fois plus vieux. Il s’agit toutefois de deux amas très « jeunes » au regard des temps astronomiques… à titre de comparaison, les Pléiades (qui est encore un « jeune » amas) s’est formé il y a une centaine de millions d’années.
La seconde différence est la composition de leur population stellaire ; si les deux amas contiennent de nombreuses supergéantes bleues et blanches (de type spectral B), seul le plus vieil amas, NGC869, présente un nombre significatif de supergéantes rouges, qui correspond à un stade plus avancé de l’évolution stellaire. Cette différence saute aux yeux en photographie, où les centaines d’étoiles blanches et chaudes contrastent avec les quelques supergéantes rouges beaucoup plus massives.
Comment expliquer que seulement quelques millions d’années de différence puisse entrainer une telle différence ? Il faut pour cela évoquer la théorie de l’évolution stellaire.
Toutes les étoiles peuvent en effet être classées selon leur 5 caractéristiques principales :
Ces caractéristiques ne sont pas indépendantes les unes des autres ; mais permettent de définir pour chaque étoile un type spectral qui est essentiellement associé à la couleur de celle-ci.
La couleur d’une étoile est déterminée par sa température de surface (la température étant elle-même déterminée par la masse et le diamètre), tandis que la gravité à la surface influe sur la largeur des raies spectrales observées.
Les étoiles se présentent ainsi dans une grande variété de couleurs : du rouge au bleu, en passant par le jaune, le blanc, l’orange… Notons qu’il n’existe toutefois aucune étoile verte ! Les étoiles les plus chaudes sont chaudes sont bleues tandis que les étoiles plus froides sont rouges.
Au début du XXe siècle, les astronomes Hertzsprung et Russell ont étudiés de manière indépendante la relation existant entre la luminosité d’une étoile et sa température de surface. En représentant sous la forme d’un graphique leur luminosité et leurs couleurs respectives, ils ont pu mettre en évidence le fait qu’il existe une relation de proportionnalité entre la température et la luminosité.
Le graphique ci-contre, dénommé « diagramme de Hertzsprung-Russell » (ou « diagramme HR »), représente ainsi la répartition des étoiles selon leur luminosité, leur couleur, leur masse et leur type spectral.
Un point de compréhension important est que ce diagramme ne représente pas une situation figée : au cours de leur vie, les étoiles se déplacent sur ce diagramme.
On constate que la grande majorité des étoiles se situent sur la « séquence principale », qui correspond à la phase de vie « normale » de leur activité (transformation de l’hydrogène en hélium) et qui constitue 80% de leur durée de vie.
Les autres branches du diagramme correspondent à des phases de transition, lorsque les étoiles quittent la séquence principale et que leur activité interne n’est plus fondée sur la fusion de l’hydrogène, mais sur des éléments plus lourds, essentiellement l’hélium. On constate qu’en fonction de leur luminosité (et de leur masse), les étoiles quittent la séquence principale selon des « embranchements » différents, plus ou moins tardifs.
Une exception notable est la branche des naines blanches, qui constitue une phase d’évolution encore plus tardive des étoiles (après l’expulsion de leurs couches externes sous forme de nébuleuse planétaire).
Le type spectral (ou « classification de Harvard) des étoiles est placé en haut du diagramme HR et est directement lié à la température, puisque celle-ci détermine les raies d’absorption majoritaires d’une étoile.
Les étoiles les plus massives sont aussi les plus lumineuses… et celles qui épuisent le plus rapidement leur réserve d’hydrogène. Alors que le Soleil passera plus de 10 milliards d’années sur la séquence principale, les supergéantes peuvent n’y passer qu’une dizaine de millions d’années tout au plus.
Pour les étoiles comprises entre 10 et 30 masses solaires, la phase de transition vers la phase des supergéantes rouges se produit donc beaucoup rapidement… ce qui explique qu’après 12 millions d’années, de nombreuses supergéantes rouges aient déjà pu se former au sein de NGC869 ; alors que son cadet, NGC884, moins âgé, n’en présente presque aucune.
Cette image a été réalisée en août 2017, avec une TSA102 à f/6 et la CCD AtikOne6.
Plus précisément, elle a été réalisée lors de la dernière nuit de mes congés d’été, alors que je devais reprendre la route le lendemain pour Paris… le ciel n’étant pas de grande qualité et présentant un léger voile, j’ai décidé d’essayer quand même une cible sur laquelle ce voile pourrait être un avantage, histoire de profiter jusqu’au bout de mes vacances… Dans des circonstances normales, j’aurais simplement laissé le matériel rangé !
Un amas ouvert suffisamment lumineux constitue dans ces conditions une cible idéale, car le léger « flou » apporté par les voiles d’altitude permet de faire « gonfler » naturellement les étoiles les plus brillantes et renforce leur couleurs ; ce qui est souvent assez esthétique sur ces objets. Bien sûr, cela implique que le voile reste très léger et surtout bien uniforme ; à défaut les passages plus ou moins opaques rendent les images brutes inutilisables. Cela se traduit également par une perte en détectivité dans le fond du ciel, mais ce n’est pas très important sur ce genre d’objets uniquement constitué d’étoiles.
Inutile toutefois dans ces conditions de tenter une version LRGB, je me suis limité à une version RGB en bin1 pour l’ensemble des couches.
Si le temps de pose reste limité, avec moins de 2h au total, j’ai quand même du passer quasiment toute la nuit en alerte pour profiter des passages moins nuageux et réaliser un nombre d’images suffisant. Cela explique également le nombre de poses différent entre les couches R, G et B. Plus de la moitié des poses sont parties à la poubelle en raison des passages nuageux…
Cependant, sur un tel objet, un tel temps de pose permet déjà de réaliser une bonne image.
La photo ayant été réalisée avec une lunette, les étoiles ne présentaient initialement aucune aigrettes ; celles-ci étant le résultat de la diffraction de la lumière sur le support du miroir secondaire d’un télescope. Il est possible d’ajouter artificiellement des aigrettes sur une image prise avec une lunette en fixant devant l’objectif des fils très fins en forme de croix (par exemple avec du fil de nylon). Sur cette image, j’ai choisi de les ajouter au traitement avec l’outil « Starspikes Pro », un plugin dédié utilisable sous Photoshop.
Ce logiciel est paramétrable à l’extrême ; aussi il est important d’ajuster finement les paramètres afin d’obtenir un résultat qui soit le plus « naturel » possible ; ce que je pense avoir réussi à obtenir sur l’image présentée ici. Je ne raffole pas spécialement des aigrettes artificielles, mais sur cet amas et surtout avec ces étoiles très brillantes, je trouve que cela apporte une petite touche d’esthétisme supplémentaire à l’image finale.
Matériel :
Takahashi TSA102 f/6
AZEQ6 via EQmod
AtikOne6 (-20°)
Guidage : OAG & Atik GP
Filtres Astronomik LRGB & Ha 6nm
Pixinsight – Photoshop
Acquisition :
R : 6 x 300s bin1
G : 7 x 300s bin1
B : 9 x 300s bin1
Intégration totale : 1h50
Date(s) de prise de vue : 27 août 2017
Alors que cette image n’aurait jamais du exister (au vu des conditions météo et de ma décision de sortir le matériel uniquement à 23h30…), elle a été récompensée deux fois : Image du jour sur Astrobin et AAPOD² !
C’était d’ailleurs ma première image récompensée en tant que IOTD sur Astrobin…
Comme quoi, cela vaut toujours la peine de sortir le matériel et d’être patient, même quand la météo n’est pas idéale ! 🙂
Le « double amas » est une cible extrêmement simple à imager. Il fait partie des cibles idéales pour les débutants, et ne posera aucune difficulté aux astrophotographes plus expérimentés. Aussi, cet objet ne requiert que peu de conseils quant à sa prise de vue.
Un avantage pour les débutants : les APN non défiltrés sont parfaitement utilisables pour photographier cette cible, en l’absence de toute nébulosité environnante. L’absence de défiltrage présente même un avantage ici, car il simplifie la calibration des couleurs des étoiles.
La seule contrainte est en réalité de disposer d’un champ permettant d’inclure les deux amas, sans que ces derniers ne soient trop à l’étroit. En ce sens, l’image présentée est sans doute un exemple « limite » du champ minimal de prise de vue. En effet, bien que les deux amas soient assez concentrés, de très nombreuses étoiles sont présentes en périphérie de ceux-ci, dans un diamètre d’environ un degré. Il serait dommage d’exclure ces étoiles périphériques du cliché, celles-ci donnant plus de profondeur à l’image par effet de contraste avec les zones plus denses.
Inversement, une bonne image de ces objets implique de disposer d’une résolution suffisante pour en résoudre les zones les plus denses. Une focale trop petite ne fait donc pas forcément l’affaire.
Les possesseurs de caméra ou d’APN à capteur plein format seront naturellement avantagés, sous réserve que l’optique leur permette d’exploiter entièrement le champ, puisque sur ce type de cibles la planéité du champ est essentielle pour obtenir des étoiles ponctuelles jusque sur le bord.
Comme le montre la présente image, il est parfaitement possible de ne procéder qu’à des acquisitions RGB, sans couche de luminance ; à la condition toutefois de conserver une résolution optimale pour l’ensemble des couches (bin1).
La réalisation d’une couche de luminance peut être réalisée à condition de disposer d’excellentes conditions météorologiques, permettant d’envisager un gain en définition et en détectivité par rapport à une version RGB. Dans cette hypothèse, il est recommandé de conserver un bin1 pour les couches RGB plutôt que du bin2, afin de préserver au maximum l’aspect des étoiles et d’éviter la formation de halos disgracieux et compliqués à gérer lors du traitement. Il est également recommandé dans ce cas de ne pas être trop avare sur le nombre de poses consacrées à la couleur, à défaut de quoi il peut être compliqué de calibrer correctement les couleurs lors du traitement, ou de bien mettre ces dernières en valeur.
Un temps de pose limité permet d’obtenir une belle image sur cette cible. Une petite heure de pose permet déjà d’obtenir un résultat satisfaisant. Il est bien sûr possible de poser plus longtemps, sous réserve que le ciel soit de qualité, afin de gagner en détectivité sur les plus faibles étoiles. Toutefois, il semble inutile de poser plus de 3 ou 4h…
Un point d’attention est, en revanche, le temps de pose unitaire : un temps de pose excessif peut saturer excessivement les étoiles les plus brillantes sans qu’aucune correction ne soit ensuite possible lors du traitement. Il est donc conseillé de procéder à quelques tests afin de déterminer le temps de pose optimal. Votre temps de pose habituel, « par défaut », peut être réduit occasionnellement cette cible, quitte à effectuer un plus grand nombre de poses unitaires à temps d’intégration global identique.
Dans la même logique, en cas d’utilisation d’un APN, attention de réduire les ISO afin de ne pas saturer les étoiles trop rapidement.
Enfin, si vous utilisez une lunette et que vous souhaitez mettre en valeur les principales étoiles de l’amas avec des aigrettes (sans recourir à leur ajout artificiel lors du traitement), il est possible de croiser 2 fils de nylon très fins devant l’objectif. La diffraction de la lumière par ces fils génèrera des aigrettes comme si l’image avait été réalisée avec un télescope.
Bien que le Double amas soit le plus souvent photographié de manière indépendante, il est possible de réaliser un magnifique cliché incluant également les superbes nébuleuses du cœur (IC1805) et de l’âme (IC1848). Le contraste entre le rouge très prononcé des nébuleuses et la dominante blanc-bleu du Double amas est magnifique.
Pour se faire, il est nécessaire d’utiliser un objectif photo de courte focale (par exemple 135mm pour un capteur 24×36, ou 100mm pour un capteur format APS-C) et d’augmenter significativement le temps de pose global ! Inutile de se soucier dans ce cas de la saturation sur les étoiles du Double amas, dans la mesure où la résolution n’est plus l’élément recherché sur une telle image grand champ.
Un capteur sensible au rouge (caméra CCD ou APN défiltré) est bien sûr indispensable et, contrairement à ce qui est possible pour le seul Double amas, un ciel d’une grande transparence n’est pas négociable !
Le Double amas n’est pas seulement une cible facile à photographier, c’est également un objet simple à traiter !
Les difficultés sont peu nombreuses et peuvent se résumer très rapidement à l’aspect et à la couleur des étoiles.
Un traitement simple et classique donnera souvent les meilleurs résultats. Le principal point d’attention est l’aspect des étoiles principales et s’assurer que celles-ci ne soient pas saturées de manière trop importantes lors de la montée d’histogramme.
Une montée d’histogramme traditionnelle (logarithme + montée fine) est parfaitement adaptée, et permettra de gérer plus simplement l’aspect des étoiles, en conservant un bel aspect gaussien.
Cette montée d’histogramme peut être réalisée de manière similaire pour la couche Luminance et les couches RGB. A noter que, comme dans le cas de l’image présentée ici, cette image peut être traitée directement en RGB ou mixée au final en LRGB sans que cela ne pose de soucis particulier. Gardez simplement à l’esprit qu’une combinaison en LRGB supposera d’augmenter la saturation de la couche couleur avant assemblage, contrairement au RGB.
En cas de traitement LRGB, la montée d’histogramme pour l’image RGB peut être réalisée par la fonction MaskedStretch, qui permet de conserver des couleurs riches en évitant toute saturation lumineuse. Attention cependant à bien paramétrer cet outil afin d’éviter un étalement trop important des étoiles et la création de halos colorés lors de l’assemblage avec la couche de Luminance.
Etape finale, cruciale sur cette cible : la calibration minutieuse des couleurs et de la saturation. La balance des blancs peut être réalisée facilement grâce aux nombreuses géantes blanches des amas. Les supergéantes rouges fournissent également un point de repère idéal pour apprécier la qualité du rendu des couleurs.
Cette étape de calibration des couleurs est surement la seule opération réellement délicate du traitement de cet objet ; et la seule susceptible de poser quelques problèmes aux débutants, notamment à ceux disposant d’un APN défiltré. A titre d’illustration, voici une de mes premières images réalisées en phase de test en 2014, avec seulement 30 minutes de pose à l’APN défiltré : mon premier traitement était incorrect et les couleurs avaient été perdues… une reprise avec Pixinsight et une meilleure calibration permettent de rétablir un équilibre dans la couleur des étoiles :
Signalons enfin qu’aucune opération de réduction d’étoiles ou de déconvolution n’est nécessaire sur cette cible !
Je privilégierais une approche totalement différente, en réalisant une image grand champ avec un objectif photo à courte focale, pour intégrer sur une même image le Double amas et les nébuleuses du Cœur et de l’âme (IC1805 et IC1848).
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