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Nom : M101 – NGC 5457 – Galaxie du Moulinet
Type : Galaxie spirale (Sc)
Distance : 23 millions AL
Taille : 28,8′ x 26,9′ (170 000 AL)
Magnitude : 7,9
Meilleure période d’observation : Printemps
Située dans la constellation de la Grande Ourse, M101 est sans doute l’une des plus belles galaxies accessibles à l’amateur ! Des dimensions généreuses (quasiment le diamètre de la Pleine Lune), une luminosité respectable, simple à situer… que demander de plus ?
Sauf que… la beauté de M101 se révèle plus au photographe qu’à l’observateur visuel. En effet, s’il est relativement aisé de la repérer dans le ciel avec une simple paire de jumelle, l’observation des bras spiraux suppose en revanche un instrument de grand diamètre (à partir de 250/300mm) et plus encore pour bien percevoir certains détails… et dans tous les cas un ciel bien sombre !
Située à 23 millions d’années-lumière de notre Voie Lactée, M101 est une galaxie spirale de grande taille : environ 70% plus grande que notre Galaxie, et plus grande encore que notre proche voisine M31 (la galaxie d’Andromède), avec 170 000 années-lumière de diamètre. Contrairement à cette dernière, qui est pratiquement vue par la tranche, M101 se dévoile de face, permettant ainsi d’apprécier l’ensemble de sa structure, en particulier son bulbe central et ses bras spiraux bien détachés, qui lui ont valu son surnom de « moulinet ».
M101 est la galaxie dominante d’un petit groupe de 5 galaxies, la plupart satellites de cette dernière, désigné comme le « Groupe M101 ». Ce groupe fait partie, comme notre Voie Lactée, du super-amas de la Vierge. Sur les images présentées ci-dessus (en particulier sur la version APN au champ plus large), on peut discerner la présence de quelques-unes de ces petites galaxies satellites, en particulier NGC5474 qui présente une physionomie assez irrégulière et atypique.
Cette petite galaxie satellite est la plus proche en distance de M101 et est vraisemblablement à l’origine de la forte asymétrie de la structure spirale de cette dernière. On remarque en effet que les bras spiraux de M101 sont répartis de manière très inégale : très denses et concentrés d’un côté, plus faibles et épars de l’autre. Les bras semblent également avoir été « étendus » d’un côté, ce qui explique les dimensions très importantes de la galaxie.
Cette asymétrie est caractéristique des effets de marées gravitationnels provoqués par le passage (plus ou moins ancien) d’une autre galaxie à proximité. En l’occurrence, les astronomes considèrent que si l’ensemble des galaxies satellites de M101 ont pu contribuer à ces effets, NGC5474 est sans doute la principale responsable.
Réciproquement, ces effets de marée ont affectés de manière beaucoup plus notable la petite galaxie NGC5474, qui présente un aspect totalement déstructuré : autrefois une galaxie spirale, son noyau est désormais fortement excentré par rapport à ses bras spiraux, dont la forme n’est pratiquement plus perceptible. A noter que les astronomes hésitent encore sur la classification exacte à lui attribuer : galaxie naine dans tous les cas, mais irrégulière ou spirale ? La question n’est pas tranchée…
Classée dans la catégorie « Sc » dans la séquence de Hubble, M101 se distingue par un un bulbe central de petites dimensions, qui contiendrait moins de 3 milliards de masses solaires : une portion ridicule en regard des quelques 1000 milliards de masses solaires estimées pour l’ensemble de la galaxie…
Cette configuration fait donc apparaître des bras spiraux très développés et dans lesquels de très nombreux détails peuvent être observés : amas, nébuleuses, zones de formations d’étoiles, etc.
Du fait en particulier des fortes interactions gravitationnelles avec ses galaxies satellites, qui génèrent de fortes ondes de choc qui déstabilisent le milieu interstellaire et les nuages d’hydrogène, on observe une quantité inhabituellement importante de zones de formation d’étoiles (zones HII) dans les bras spiraux de M101. Plus de 1250 de ces zones actives ont ainsi été recensées dans cette galaxie, et un grand nombre d’entre elles sont par ailleurs particulièrement étendues et actives… à tel point même que 3 de ces zones HII possèdent leur propre numéro NGC !
Ces zones HII sont si actives que les observations mettent en évidence la création d’un grand nombre d’étoiles très massives, de plusieurs dizaines de masses solaires, ainsi que des phénomènes très énergétiques visibles en rayons X (notamment la présence de « superbulles », des sources X ultralumineuses autres que les trous noirs, ou encore des « binaires X » constituées d’étoiles tournant autour d’une étoile à neutrons ou d’un trou noir…).
L’image ci-contre, obtenue par le satellite Chandra, montre la galaxie M101 observée dans les rayons X et laisse apparaître l’étendue des activités de haute énergie qui s’y déroulent : supernovae, étoiles à neutrons, présence de trous noirs, superbulles, etc.
La présence d’un grand nombre d’étoiles très massives, de durée de vie très limitée, conduit également à un nombre important de supernovae : 4 ont ainsi été observées depuis 1909 dans la galaxie M101. La dernière en date, en août 2011, était non seulement l’une des plus lumineuses jamais observées, mais surtout la supernova de type Ia dont la détection a été le plus précoce, à peine 11h après l’explosion ! Cette détection rapide a permis une analyse spectroscopique des couches externes de la supernova, qui a confirmé la prédiction théorique que l’objet à la base de l’explosion est une naine blanche carbone-oxygène (les traces d’oxygène ayant été détectées pour la première fois), et – plus surprenant – que l’étoile compagnon n’était pas une géante rouge comme la plupart des modèles le prévoient, mais une étoile de masse semblable à celle du Soleil… de quoi donner quelques nuits blanches aux astrophysiciens pour développer un nouveau modèle qui explique ces observations.
La forte activité dans les bras spiraux explique également la couleur bleue très prononcée de ceux-ci : cette teinte traduit la présence d’un grand nombre d’étoiles jeunes, massives et chaudes : des géantes ou supergéantes bleues. Le noyau central, constitué quant à lui d’étoiles plus vieilles, moins massives et moins chaudes, prend une coloration plus rouge/jaune.
L’image APN a été réalisée en mai 2015. Il s’agissait alors de l’une de mes premières photographies avec la lunette TSA-102.
Malgré le temps de pose assez limité, j’étais cependant assez satisfait de cette image qui m’avait demandé beaucoup de temps de traitement. A l’époque, je commençais à prendre en main Pixinsight et je n’avais pas encore de « routine » de traitement bien établie… Cependant, il s’agissait clairement d’une cible à refaire une fois passé à la CCD, avec un temps de pose plus conséquent pour bien mettre en valeur les faibles bras spiraux de cette belle galaxie !
L’image CCD a été réalisée sur 3 nuits consécutives, les 25, 26 et 27 février 2018. Il s’agit à ce jour de mon image bénéficiant du plus long temps de pose global, avec plus de 23h de pose !
La luminance a été réalisée avec 92 poses unitaires de 10 minutes chacune, soit plus de 15h au total. Les couches couleurs sont quant à elles plus modestes, avec un peu plus de 2h par couche. Une petite heure de pose seulement en Ha vient compléter les acquisitions. Seule la luminance a été réalisée en bin1, les couches couleurs et Ha ayant été réalisées en bin2 pour compenser le temps de pose limité.
Malgré ce temps de pose conséquent, les acquisitions ont été vraiment compliquées, avec un souci de mise en station dont je ne me suis aperçu qu’après la première nuit (je détaille un peu plus cette mésaventure dans l’anecdote ci-dessous…).
Le traitement de cette image a donc été compliqué, malgré un bon signal obtenu grâce au temps de pose en luminance. Un tri rigoureux des brutes a été nécessaire pour traiter différemment les brutes correctes et offrant de bons détails, les brutes moyennes mais acceptables et les mauvaises images…
J’ai ainsi traité séparément 4 images de luminance pour les mixer au final, en utilisant :
Pour la couche couleur, le temps de pose en bin2 était déjà suffisant, mais j’ai également décidé de mixer le résultat avec l’image couleur de la version APN de 2015, afin de réduire encore un peu le bruit chromatique.
La couche Ha, quant à elle, a été mixée sur la couche couleur directement, au moyen du script HaRVB_AIP de Pixinsight.
Ces deux images illustrent bien la différence de résultat qu’il est possible d’obtenir entre un APN (défiltré) et une caméra CCD : la version CCD offre un signal beaucoup plus visible dans les bras spiraux et permet de mettre en valeur les lointaines extensions qui sont noyées dans le fond de ciel sur la version APN ! La version CCD offre également une meilleure résolution.
Bien sûr, la différence de temps de pose limite la comparaison qu’il est possible de faire entre les deux images sur la simple base des seuls caméras ; mais pour autant, la version 2015 propose déjà une version très correcte de ce que peut donner une image APN sur cette galaxie…
Avantage également à la CCD pour la mise en valeur des régions HII dans les bras spiraux : l’APN, même défiltré donc plus sensible au rouge, ne fournit pas autant d’information au final.
Matériel :
Takahashi TSA102 f/6
AZEQ6 via EQmod
Canon 1100D Astrodon
Filtre Baader Neodynium
Guidage : lunette-guide 50mm
Backyard EOS – Pixinsight – Photoshop
Acquisition :
45 x 300s
800 iso
Intégration totale : 3h45
Date(s) de prise de vue : 15 mai 2015
Matériel :
Takahashi TSA102 f/6
AZEQ6 via EQmod
AtikOne6 (-20°)
Guidage : OAG & Atik GP
Filtres Astronomik LRGB & Ha 6nm
Pixinsight – Photoshop
Acquisition :
L : 92 x 600s bin1
R : 27 x 300s bin2
G : 27 x 300s bin2
B : 27 x 300s bin2
Ha : 12 x 300s bin2
Intégration totale : 23h05
Date(s) de prise de vue : 25, 26 & 27 février 2018
Malgré le long temps de pose sur cette image, les acquisitions ont été une véritable galère : impossible de réaliser un autoguidage correct au cours de la première nuit !
Voici pour l’exemple une brute de 5 minutes sur NGC2403 qui était ma cible initialement :
Vu ces résultats, je me suis décidé à me rabattre sur M101, une cible plus simple et dans une zone où l’autoguidage arrivait quand même à tenir la route, même si loin de ses performances habituelles… J’ai ainsi effectué les images couleurs en bin2 au cours de la première nuit avec ce mauvais suivi pour limiter la casse…
Un suivi très mauvais, des corrections impossibles, des dérives… tout ça aurait du me mettre la puce à l’oreille : quand c’est aussi mauvais alors que tout se passe bien en temps normal, il ne s’agit pas d’un « petit » problème comme ceux que j’ai vérifié 10 fois au cours de la nuit (refaire l’équilibrage, vérifier les caméras, les câbles, les drivers…), mais bien d’un souci plus sérieux. Et 9 fois sur 10, c’est la mise en station qui est en cause !
A court d’idées, j’ai fini par démonter tout le setup et j’ai recommencé l’installation avant la 2e nuit…
Et c’est alors que j’ai réalisé d’où provenait l’erreur : lors de la mise en station, j’avais indiqué une polaire à « 6h » dans EQmod alors que je l’avais placée en haut du cercle, donc… à « 12h » :blase:
Evidemment, avec une telle erreur de mise en station (quasiment 1°!) aucune chance que l’autoguidage soit efficace… l’orthogonalité déficiente impliquait à chaque correction sur un axe une dérive sur l’autre… un cercle vicieux qui auto-entretient les dérives sur les deux axes !
Au final, les brutes de la première nuit – de moindre qualité – ont cependant été conservées en leur attribuant un coefficient de pondération moins important au cours du stacking dans Pixinsight.
M101 est une galaxie assez étendue, et il est de ce fait assez simple de la photographier même avec un instrument de petite focale (à partir de 400mm pour obtenir quelques détails intéressants). Le grand champ en résultant permet une « mise en abîme » qui peut être très esthétique de cette galaxie, à condition toutefois d’y consacrer un temps de pose suffisant.
Les instruments dotés d’une focale intermédiaire (de 600 à 1000mm) seront parfaitement adaptés pour la prise de vue, y compris avec des capteurs de taille moyenne type APS-C voire inférieurs. Cette configuration est particulièrement bien adaptée pour saisir M101 accompagnée de ses petites galaxies satellites, dont la présence donne beaucoup de profondeur et de relief à l’image. Attention toutefois à disposer d’un champ parfaitement plan afin d’éviter des crop qui vont diminuer le champ de l’image finale…
Le cas échéant, une orientation du capteur en diagonale peut aider à intégrer au mieux les galaxies satellites, qui sont dispersées sur environ 2°. Si vous êtes amenés à faire un choix dans les galaxies satellites à intégrer dans le champ, privilégiez NGC5474 qui est visuellement la plus intéressante…
Avec une focale plus conséquente (de 1200 à 2000mm et plus), il sera nécessaire de disposer d’un capteur grand format (par exemple de 35mm de diamètre pour 2000mm de focale) et de veiller lors du cadrage à bien prendre en compte les extensions lointaines qui ne seront susceptibles d’apparaître qu’une fois le stacking réalisé… Cette catégorie de focales permet de réaliser de magnifiques plans serrés de M101 qui peuvent être très impressionnants !
Bien que M101 soit, en dimensions apparentes, l’une des plus grandes galaxies accessible aux amateurs, sa prise de vue est cependant loin d’être simple dès lors qu’on se fixe pour objectif de mettre en valeur au mieux ses bras spiraux ! En effet, sa magnitude de surface est assez faible et, de ce fait, il est impératif de prévoir un temps de pose significatif pour obtenir un signal exploitable loirs du traitement, en particulier dans les bras spiraux et les extensions plus faibles, uniquement visibles ici sur la version CCD.
Il est donc nécessaire de réaliser des images unitaires avec un temps de pose conséquent, voire revu à la hausse par rapport au temps de pose habituel sur ce type de cibles. Dans le cas présent, j’ai procédé à des images unitaires de 10 minutes pour la luminance ; mais j’aurais aimé pousser jusqu’à 15 minutes sans les problèmes initiaux de suivi et surtout si la Lune avait été moins présente. Naturellement, ces recommandations de temps de pose unitaire s’entendent pour un ciel bien noir : en cas de pollution lumineuse ou de Lune assez présente, il sera nécessaire de revoir ces ambitions à la baisse.
De la même manière, le temps de pose global doit être aussi long que possible. Je ne donnerai pas ce conseil pour beaucoup d’objets, mais pour M101, je vous recommande si vous le pouvez de prévoir au moins 2 nuits d’acquisition ! Bien sûr, si vous n’en n’avez pas la possibilité, quelques heures de pose vous permettront déjà de réaliser une image très honnête de cette galaxie ; mais à coup sûr vous serez tenté d’y revenir par la suite…
A défaut d’un temps de pose conséquent, vous risquez en effet d’avoir quelques difficultés lors du traitement pour bien faire ressortir les bras spiraux de la galaxie du fond de ciel. Il n’est pas rare de voir sur cette cible des images assez peu contrastées, où la galaxie semble rapidement « noyée » dans le fond de ciel dès qu’on s’éloigne du bulbe central. Or, toute la beauté de cette galaxie réside dans les majestueuses extensions de ses bras spiraux… Il serait donc dommage de passer à côté !
Sur cette galaxie, plus que sur d’autres, on ne peut que recommander de réaliser des acquisitions avec un filtre Ha, afin de mieux mettre en valeur les très nombreuses et remarquables régions HII de ses bras spiraux. M101 est en effet l’une des galaxies comptant le plus de ces zones actives en formation d’étoiles (plus de 1600 recensées dont 3 si importantes qu’elles possèdent leur propre numéro NGC). Comme le montre la version CCD présentée ici, une petite heure de pose en bin2 permet déjà d’obtenir un résultat très amélioré ; mais il est toujours possible de faire mieux et de prévoir quelques heures en bin1 pour essayer d’obtenir plus de détails dans ces régions.
Pour les utilisateurs d’APN, les boîtiers défiltrés donneront les meilleurs résultats en permettant de mieux capturer le signal de ces régions HII. Attention cependant à bien réaliser la calibration des couleurs lors du traitement (par exemple en utilisant le process PCC de Pixinsight).
S’il est important de privilégier un long temps de pose pour la luminance, cela ne doit cependant pas se faire au détriment des couches couleurs : les nuances de M101 sont assez subtiles et il serait dommage de dégrader une bonne luminance par une couche couleur contenant un fort bruit chromatique ! Toutefois, dans la mesure où il n’y a guère de petits détails à espérer obtenir dans la galaxie elle-même sur la couche couleur, vous pouvez privilégier des poses en bin2 sans craindre de trop dégrader le résultat final.
Quelques recommandations complémentaires relatives à la prise de vue sur cette cible :
Signalons que cette galaxie est assez avare en détails dans ses bras spiraux avec des acquisitions classiques. L’effet de la turbulence est par ailleurs renforcée avec l’augmentation des temps de poses unitaires…
La technique de l’imagerie en poses courtes (lucky imaging), inspirée de l’imagerie planétaire, offre une solution alternative permettant d’espérer saisir des détails beaucoup plus nombreux qu’avec une image traditionnelle en « figeant » la turbulence avec des poses d’une à deux secondes.
Un défi peut donc consister à utiliser cette technique sur cette galaxie ; avec à la clé de beaux résultats, à l’instar de David « Shaïhulud » Dominé sur cette même cible en combinant 6652 poses de 2 secondes !
Mieux vaut être prévenu : le traitement de M101 est loin d’être simple ! 🙂
On pourrait s’attendre à ce que s’agissant d’une des galaxies les plus grandes du ciel, un peu de facilité soit au rendez-vous… mais comme pour d’autres galaxies étendues, telles que M31 ou M33, cette étape peut se révéler assez complexe et ce, même si vous disposez d’une image brute avec un signal bien présent.
La difficulté réside ici dans le fait que, même si la magnitude de M101 est assez élevée, cette luminosité est répartie sur une grande surface ; la galaxie étant vue de face. Il en résulte un contraste peu prononcé.
En dehors du bulbe central, qui reste contrasté, les bras spiraux deviennent quant à eux rapidement assez ténus en s’éloignant du centre, en particulier du côté où les structures sont altérées par les effets de marée.
Ce manque de contraste sera cependant plus fragrant avec un APN qu’avec une CCD, mais même avec un capteur sensible (comme ici le Sony 694), la mise en valeur des bras spiraux demeure un vrai défi.
Pour mettre toutes les chances de son côté, ces difficultés doivent être anticipées au stade de l’acquisition en adoptant un temps de pose le plus long possible ainsi que d’autres précautions évoquées dans la section précédente…
Ensuite, une vigilance particulière doit être apportée lors de la phase de prétraitement. Le cas échéant, si vos brutes sont de qualité variable, n’hésitez pas à effectuer une pondération afin d’attribuer un plus grand coefficient aux meilleurs images, sans pour autant éliminer les images de qualité inférieure. Sur cette image, où j’ai consacré beaucoup de temps au traitement et ai réalisé de nombreux tests lors de l’empilement afin de déterminer quelle méthode donnait les meilleurs résultats, j’ai en effet constaté qu’il était préférable de conserver toutes les images en leur attribuant une pondération adéquate plutôt que d’en éliminer une partie significative ; notamment dans la qualité du rapport signal sur bruit et l’aspect du fond de ciel.
Dans ce cas, une solution peut être d’attribuer un coefficient qui tienne compte principalement du facteur « bruit » de chaque image.
Naturellement, l’exercice a ses limites : si certaines brutes sont atteintes de défauts rédhibitoires, elles devront malgré tout être écartées… Cela n’est pas gênant dès lors que cela ne représente pas une part significative de vos images.
Par ailleurs, rien ne vous interdit de créer plusieurs images que vous pourrez mixer au final, afin par exemple de conserver le maximum de brutes pour améliorer le rapport signal sur bruit global et de réaliser un empilement des brutes avec la meilleure résolution pour ne pas altérer les plus fins détails.
Vous trouverez plus d’explications et de conseils sur ce point dans mon tutoriel consacré au prétraitement, et plus particulièrement à l’étape de sélection et de pondération des images Light.
Sur cette image, voici à titre d’illustration deux images réalisées par deux méthodes d’empilement différentes, l’une pour mieux mettre en valeur les extensions et le faible signal, l’autre pour mettre en évidence les détails. Les deux images ont été ensuite « mixées » pour obtenir une version combinant les avantages de chaque image, à l’aide de masques de fusion adaptés :
Naturellement, chacune de ces versions doit être ensuite traitée de manière distincte, en utilisant en particulier une montée d’histogramme adaptée au signal et un rehaussement de détails spécifique pour la version « détails ».
Lors du traitement proprement dit, une étape cruciale sera donc tout d’abord la montée d’histogramme de l’image de Luminance.
Si vous disposez d’un nombre limité d’images brutes ou d’un temps de pose global restreint, l’option la plus fiable est de s’en tenir à une montée d’histogramme classique en mode logarithme et suivie d’un ajustement manuel. Cela garantira une bonne gestion du bruit et un contraste satisfaisant dans les parties principales des bras, ainsi qu’un contraste plus marqué avec le fond de ciel.
Si vous disposez en revanche d’une grande qualité de brutes et d’un temps de pose global notable, alors vous pourrez privilégier une montée d’histogramme plus ambitieuse, par exemple avec le process MaskedStretch de Pixinsight. Une telle montée d’histogramme vous permettra de bénéficier d’une meilleure mise en valeur des bras spiraux mais aussi des faibles extensions qui s’étendent plus loin encore… Attention toutefois à sélectionner une zone de fond de ciel de référence exempte de tout signal ; ce qui ne devrait pas poser de souci dans le cas présent. Si le résultat ne vous convainc pas, mieux vaut vous arrêter tout de suite et procéder à d’autres essais, car il peut être très compliqué d’atténuer certains aspects trop prononcés d’une telle montée d’histogramme par la suite…
Vous pouvez ensuite affiner, si besoin, cette montée automatique par un ajustement manuel des curseurs. L’important est, dans tous les cas, de conserver un contraste assez prononcé entre les plus faibles extensions des bras spiraux et le fond de ciel. Vous pouvez réaliser si besoin cette étape en vous aidant de masques adaptés, localisés et progressifs (donc suffisamment floutés). Attention toutefois à ne pas « sur-traiter » l’image en cherchant à rehausser le signal de manière exagérée dans les plus faibles extensions : vous risquez de créer des zones de transition très prononcées qui vont nuire à l’esthétique global de l’image et lui feront perdre son aspect « naturel »… Il faut respecter la réalité « physique » de l’objet et que les plus faibles extensions demeurent ténues, en se détachant juste légèrement du fond de ciel.
De manière général, un bon fil conducteur doit être de veiller à ce que la luminosité de la galaxie conserve un dégradé progressif et naturel depuis le bulbe central jusqu’aux plus lointaines extensions. Faire monter outre mesure les signaux les plus faibles conduira certes à une augmentation globale de la luminosité de la galaxie, mais au détriment du contraste de ses structures, voire même – dans les cas les plus extrêmes – à une impression générale de « flou » de la galaxie.
Vous trouverez des détails sur cette étape de montée d’histogramme dans mon tutoriel consacré au traitement simple d’une image monochrome… en attendant des tutoriels plus avancés ou plus spécifiquement consacrés à cette étape particulière.
Une autre difficulté habituelle sur cette cible est l’aspect quelque peu « cotonneux » des bras spiraux, qui ne présentent guère de détails.
Il peut donc être intéressant de chercher à rehausser les détails au sein des bras spiraux, en particulier dans les zones les plus lumineuses et contrastées. La région du bulbe et des bandes poussières proches du centre de la galaxie se prêtent particulièrement bien à cet exercice.
Pour ce faire, vous pouvez par exemple utiliser les fonctionnalités HDRMultiscaleTransform sous Pixinsight ou Local Contrast Enhancement dans AstroTools sous Photoshop. Dans les deux cas, un travail avec des masques de fusion permet de n’augmenter les détails que dans les zones les plus lumineuses, afin de limiter la montée du bruit dans les zones plus faibles et de ne pas dénaturer l’aspect gaussien des étoiles présentes dans les zones traitées.
Pour en savoir plus sur la mise en œuvre de ces process de rehaussement de détails, je vous invite à consulter le tutoriel dédié à HDRMT, ainsi que le tutoriel plus général consacré à l’amélioration des détails avec Pixinsight, ainsi que le tutoriel spécifique à Photoshop le cas échéant.
Pour ce qui concerne la couche couleur, l’opération la plus délicate sera la calibration des couleurs. M101 présente en effet des couleurs très prononcées qu’il faut veiller à respecter ; en particulier la teinte très bleutée des bras spiraux au sein desquels de très nombreuses géantes bleues sont créées du fait des forts effets de marée gravitationnels résultant des interactions avec la galaxie satellite NGC5474. La partie centrale, composée d’étoiles plus vieilles, présente quant à elle une teinte qui tend plus vers le jaune/rouge…
Le process PhotometricColorCalibration donne des résultats assez convaincants sur cette cible, mais vous pouvez toujours ajuster plus finement ces réglages lors de la phase finale du traitement, par exemple au moyen de l’outil Correction Sélective de Photoshop.
Enfin, une dernière étape importante est l’intégration de la couche Ha sur l’image Couleur.
Ma recommandation sur cette cible est de veiller à préserver le plus possible les zones ne présentant pas un signal Ha prononcé.
M101 contient un très grand nombre de zones HII qui doivent être rehaussées et il est donc préférable d’adopter une technique d’intégration localisée, par exemple en utilisant PixelMath.
A défaut, l’équilibre des couleurs dans les autres zones de la galaxie risque d’être sensiblement altéré.
Pour une présentation détaillée des différentes techniques d’intégration, je vous renvoie à mon tutoriel consacré à l’intégration de la couche Ha sur l’image couleur.
Compte-tenu du temps de pose conséquent passé sur l’image CCD de 2018, je n’envisage pas de refaire M101 dans un avenir proche… du moins avec le même matériel !
Je tenterais cependant volontiers l’aventure avec un instrument disposant d’une focale légèrement plus longue, afin de gagner en finesse et en résolution et mieux mettre en valeur les détails au sein de la galaxie…
En revanche, en regardant mon image avec un œil critique, je me dis qu’il est sans doute possible d’obtenir un meilleur résultat au niveau du traitement, notamment au niveau de l’aspect un peu « lissé » de l’image et de l’équilibre des couleurs.
Une piste d’amélioration également : réaliser la couche Ha non pas en bin2, mais à pleine résolution en bin1, afin de mieux mettre en valeur les nombreuses zones HII dans les bras de la galaxie.
Dans tous les cas, je ferai en sorte que mes prochaines acquisitions sur cette cible soient réalisées uniquement à l’approche de la nouvelle Lune !
Si l’espace commentaires n’est pas accessible, consultez le guide pratique pour y remédier !
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