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Nom : IC 1396 – Sh2-131 – Nébuleuse de la trompe d’éléphant
Type : Nébuleuse par émission
Distance : ~2400/3000 AL
Taille : 170′ x 140′ (~120/150 AL)
Magnitude : 9,4
Meilleure période d’observation : Automne
La constellation de Céphée, traversée par la Voie Lactée, est l’une des plus riche du ciel et propose beaucoup de nébuleuses très variées, en particulier de grands nuages de poussières formant des nébuleuses obscures et par réflexion en de multiples endroits (par exemple la nébuleuse de l’Iris, Barnard 150 ou VDB141…) mais aussi quelques magnifiques nébuleuses en émission.
Parmi ces dernières, on peut citer notamment la nébuleuse du sorcier, NGC 7822, ou encore la nébuleuse du Lion.
Mais l’une des plus impressionnantes est incontestablement IC 1396 (également dénommée sh2-131), qui présente un diamètre apparent supérieur à 5 fois la pleine Lune (170′ x 130′) !
Malheureusement très peu lumineuse, on peut espérer la discerner faiblement aux jumelles, voire à l’œil nu sous certains cieux exceptionnels (avec la vision décalée). Même avec un instrument de plus grand diamètre, avec un filtre UHC ou OIII, n’espérez toutefois pas y déceler des détails : il s’agit du genre d’objets qui se dévoilent uniquement au moyen de la photographie !
La distance de cette nébuleuse reste sujette à débats et est généralement estimée entre 2400 et 3000 années-lumière. Connaissant cette distance et ses dimensions apparentes, il est possible de calculer la taille réelle de cette nébuleuse : celle-ci s’étend sur une longueur considérable comprise entre 120 années-lumière (en retenant la valeur basse de distance) et 150 années-lumière (en retenant la valeur haute de distance). Pour se faire une idée de ce que représente une telle taille, imaginez que dans un sphère de même diamètre, centrée sur le Soleil, on dénombre pas moins de 1500 systèmes stellaires et 2000 étoiles, soit les deux-tiers des étoiles visibles à l’œil nu dans l’hémisphère nord ! A comparer également avec la nébuleuse d’Orion, qui s’étend « seulement » sur 25 années-lumière…
Il s’agit donc d’un immense nuage de gaz (essentiellement d’hydrogène), illuminé par l’ionisation provoqué par le rayonnement très énergétique des jeunes étoiles qui naissent en son sein depuis quelques centaines de milliers d’années. Car ces nébuleuses sont de véritables « pouponnières » d’étoiles : celles-ci naissent dans les régions les plus sombres et opaques où la densité de matière et la température sont les plus importantes, en raison de l’effondrement gravitationnel de la matière environnante, les ondes de choc ou encore la pression de radiation. La matière au sein de ces zones opaques finit par s’écrouler localement sous la forme de petits « globules de Bok », qui constituent des proto-systèmes stellaires. Ces globules ont une masse typique comprise entre 10 et 50 masses solaires, contenue dans un diamètre d’environ 1 année-lumière, et aboutissent à la création d’une ou plusieurs étoiles.
Au sein de sh2-132, on compte ainsi plus d’une trentaine de ces globules, dont le plus connu est situé au sein de la large structure en pilier dénommée « la trompe d’éléphant » (VDB 142, qui est l’objet principal de l’image présentée ici). Cette structure est assez semblables aux fameux « piliers de la création » observables dans la nébuleuse de l’Aigle (M16). Cette structure elle-seule abrite de nombreuses étoiles jeunes (âgées de 100 000 ans au plus) et l’on estime qu’une centaine d’étoiles sont actuellement en formation dans l’ensemble de la nébuleuse. Au sein de la trompe d’éléphant, le rayonnement de certaines jeunes étoiles a commencé à disperser la matière concentrée dans les zones opaques : on constate ainsi l’apparition de « cavités » au sein de ces bandes plus compactes. Ce phénomène est particulièrement spectaculaire dans la zone située au bout de la trompe, où une telle cavité a commencé à se former depuis une période relativement récente : celle-ci conserve une forme sphérique et dévoile ainsi ces étoiles déjà âgées d’environ 1 million d’années. Les plus jeunes étoiles restent, quant à elles, encore cachées dans les zones les plus sombres…
A noter que l’on retrouve également ce phénomène de « cavités » résultant du vent stellaire et de la pression photonique à de plus grandes échelles au sein de la nébuleuse : c’est le cas par exemple à proximité du centre, où l’on observe une zone de forme sphérique nettement moins dense et moins lumineuse. La création de telles cavités entraîne une condensation du gaz à la périphérie et conduit à la création de nouvelles étoiles, de manière similaire à ce qu’on peut observer au sein de la nébuleuse IC 1848.
On estime que cette nébuleuse existe depuis environ million d’années ; ce qui correspond à l’âge des étoiles les plus chaudes de l’amas central (de type B0)
Deux étoiles sont particulièrement remarquables dans cette région. La première est HD206267, une géante bleue située au centre de la nébuleuse et qui est en grande partie responsable de l’ionisation du gaz aux dans l’ensemble de la nébuleuse.
La seconde, extérieure à la nébuleuse, est l’étoile Mu Cephei, également dénommée Erakis ou « l’étoile grenat » en raison de sa teinte caractéristique : il s’agit d’une supergéante rouge de 25 masses solaires, 350 000 fois plus lumineuse que le Soleil et qui compte parmi les plus grosses étoiles visibles à l’œil nu.
Son diamètre est plus de 1200 fois supérieur à celui de notre étoile : placée au centre du système solaire, elle s’étendrait au-delà de l’orbite de Saturne !
Il ne reste à cette étoile « hors-normes » que quelques centaines de milliers d’années avant de connaître une fin cataclysmique sous forme de supernova… Elle ne maintient d’ailleurs actuellement que difficilement son équilibre, ce qui se traduit par des variations d’éclat assez significatives : sur des périodes de 860 jours, sa magnitude passe ainsi de 3,5 à 5, ce qui correspond à une différence d’éclat d’un facteur 3 !
Pour essayer de se représenter la luminosité d’un tel astre, songez que celui-ci est parfaitement visible à l’œil nu à une distance de 3000 années-lumières (et suffisamment brillante pour se placer 12e étoile de la constellation de Céphée), alors que le Soleil, lui, disparait à une distance de 35 années-lumière à peine…
Petit « fun fact » pour finir : l’étoile Grenat indique le pôle nord… sur Mars ! Si d’aventure des astronomes amateurs posent un jour leurs télescopes sur la planète rouge, ils devront aligner cette étoile pour effectuer la mise en station, de la même manière qu’on pointe l’étoile Polaire sur Terre ! 🙂
Cette image a été longue à réaliser, puisqu’il s’est écoulé plus de 3 ans et demi entre les premières acquisitions et sa publication… Ce qui ne traduit aucunement la difficulté de cette cible mais plutôt une mauvaise gestion de mon planning d’acquisition ! 🙂
La première série d’images a été réalisée fin août 2018 depuis la Corse. Ne disposant alors pas d’un nombre suffisant de brutes et n’ayant plus eu l’occasion d’en rajouter au cours de la saison, j’ai décidé d’attendre l’année suivante pour ajouter d’autres images. Mais en 2019, j’étais occupé sur une autre cible que je souhaitais finir en priorité, donc cette nébuleuse est passée à la trappe… même chose en 2020 pour des raisons similaires et l’absence d’opportunité en raison des confinements Covid…
Il m’a donc fallu attendre la fin de l’été 2021, depuis la Charente-Maritime, pour réaliser de nouvelles acquisitions. Et comme je n’étais plus à quelques mois près, l’image a finalement été traitée et publiée en janvier 2022 !
Les acquisitions ont été réalisées avec une lunette TSA-102, équipée de son réducteur de focale (f/6), une caméra CCD Atik One 6.0 et des filtres bande-étroite en SHO 6nm.
Niveau choix du capteur et cadrage : les habitués de ce site se demanderont sans doute pourquoi je n’ai pas utilisé la Atik 16200, qui propose un champ photo bien plus important que la Atik One et qui aurait permis de quasiment faire rentrer l’ensemble de la nébuleuse dans le champ en une seule prise (au chausse-pied cependant… une mosaïque de 2 images serait toutefois nécessaire pour donner un peu de marge et inclure par exemple l’étoile grenat). La réponse est simple : lorsque j’ai débuté les acquisitions en 2018, je n’avais pas encore la 16200 ! J’ai donc décidé d’achever cette image avec la même caméra plutôt que de tout reprendre… Cela oblige bien sûr à faire un choix de cadrage, en privilégiant bien sûr la zone de la trompe et en essayant d’inclure certaines zones de nébuleuse et des bandes de poussières intéressantes.
Bien que la période d’acquisition ait été très allongée, les poses ont été réalisées sur seulement 4 nuits, pour un total d’un peu plus de 15h. La couche Ha représente 6h de pose avec des brutes unitaires de 900s en bin1, tandis que les couches OIII et SII ont demandé 3h chacune, en bin2. Une série de poses avec les filtres RGB a été réalisée (1h par filtre), afin de redonner aux étoiles leur couleurs naturelles (ce qui est toujours un « plus » pour une image SHO). On peut cependant considérer que cette image a été « pour l’essentiel » (du signal, des détails…) réalisée avec 12h de pose, sans prendre en compte les couches RGB.
Malgré ce temps de pose global limité, la réalisation de brutes Ha de 900s m’a permis de capter un signal intéressant tout en maintenant une résolution suffisante pour mettre en valeur de nombreux détails (bien aidé par un seeing correct et un autoguidage impeccable).
Comme je le fais souvent lorsque je photographie en nomade, j’ai réalisé la couche Ha en bin1, et les couches SII et OIII en bin2. L’ensemble des informations essentielles pour les détails étant présents sur la couche Ha, la finesse du résultat final n’en pâtit donc pas puisque cette couche Ha a également servi d’image de Luminance lors du traitement.
Sur cet objet, et en particulier lorsque l’image se concentre sur un fragment de la nébuleuse, l’imagerie narrowband permet d’obtenir une palette de couleurs bien plus riche et des détails plus intéressants qu’en LRGB-Ha (qui donne un résultat globalement uniforme en terme de teintes, le rouge étant ultra-dominant…). Le SHO, plus encore que le HOO, permet de révéler de subtiles nuances, synonymes de variations dans la composition physique de la nébuleuse. Ces nuances sont particulièrement prononcées entre le centre de la nébuleuse (où le OIII est très présent) et les bords de la nébuleuse, avec une multitude de transitions plus ou moins complexes entre le bleu, le vert et le rouge.
Enfin, la résolution du capteur monochrome couplé à des filtres très sélectifs permet d’obtenir une image « ciselée » : non seulement les étoiles sont plus fines, mais les nébulosités et les bandes de poussières obscures présentent beaucoup de dégradés et de détails.
Matériel :
Takahashi TSA102 f/6
AZEQ6 via EQmod
AtikOne6 (-15°)
Guidage : OAG & Atik GP
Filtres Astronomik SHO 6nm + RGB
Pixinsight – Photoshop
Acquisition :
Ha : 24 x 900s bin1
OIII : 20 x 600s bin2
SII : 18 x 600s bin2
RGB : 36 x 300s bin2
Intégration totale : 15h20
Date(s) de prise de vue : 12, 19 août 2018 et 17, 18 août 2021
IC 1396 est l’une des nébuleuses les plus étendues du ciel…La première et principale difficulté est donc de disposer d’un champ photo suffisant pour la faire rentrer dans le cadre !
Pour ce faire, il ne faut pas dépasser une focale de 300mm avec un capteur au format APS-C. Une petite lunette de 400mm équipée d’un réducteur adapté peut donc convenir.
Les possesseurs de capteur plein format (full frame) sont naturellement avantagés sur ce point, en pouvant utiliser une focale jusqu’à 400mm pour la photographier dans son ensemble avec une marge suffisante pour inclure également l’étoile grenat !
Dans tous les cas, en particulier avec l’usage d’un réducteur ou le recours à un capteur 24×36, le champ photo doit être parfaitement plan, afin que les étoiles demeurent bien ponctuelles jusque sur les bords de l’image…
Pour cet objet, en particulier avec un capteur APS-C, il est donc souvent recommandé de troquer son optique habituelle pour un téléobjectif photo (de 200 à 300mm) de bonne qualité afin de conserver des étoiles ponctuelles sur tout le champ.
Compte-tenu de la faible luminosité de surface de cette nébuleuse, il est recommandé de privilégier des nuits sans Lune et bien transparentes. La présence de voiles d’altitude ou d’humidité dans l’air diminue la détection de la nébuleuse, tout en augmentant la taille des étoiles. Ces conditions idéales sont encore assez fréquentes à la fin de l’été ou au tout début de l’automne, tout en bénéficiant de nuits de plus en plus longues…
Comme toujours, un ciel dépourvu de pollution lumineuse est un avantage ; mais encore plus sur ce type d’objets étendus et faiblement lumineux où les longs temps de pose sont de mise. Un ciel modérément pollué peut toutefois convenir, moyennant l’utilisation avec un APN ou un capteur couleur d’un filtre UHC adapté et une augmentation des temps de pose unitaires. A noter également que l’utilisation de filtres « multi-bandes » peut s’avérer un excellent choix avec un capteur couleur dans une zone affectée par la pollution lumineuse.
De manière générale, si le ciel et votre matériel le permettent, prévoyez un temps de pose global suffisant et si possible d’augmenter les temps de pose unitaires par rapport à vos standards habituels (sous réserve des capacités de la caméra et de votre autoguidage…). Par exemple, si vous faites habituellement des poses de 5 minutes, tentez de monter à 10 minutes sur cette cible. Un temps de pose unitaire plus long facilitera la mise en valeur des nébuleuses au final ; sous réserve de conserver un nombre d’images brutes suffisamment élevé.
Cette nébuleuse peut être imagée aussi bien en RGB qu’en SHO. En RGB, l’ensemble de la nébuleuse ressortira sous une forte dominante rouge, avec des teintes assez peu distinctes. Il est donc recommandé de soigner la couche couleur avec une caméra monochrome, en consacrant un temps satisfaisant à l’ensemble des trois couches RGB. Une couche Ha, qui peut remplacer avantageusement une luminance classique, est obligatoire sur cette cible pour espérer pouvoir la mettre en valeur correctement. Dans ce cas, la présence de l’étoile grenat apporte immédiatement un « plus » indéniable à l’image, de par le contraste de couleur qu’elle permet, notamment avec la géante bleue au centre de la nébuleuse.
En SHO, il sera possible de mettre en évidence beaucoup plus de détails qu’en RGB, en particulier dans les nébulosités sombres et les bandes de poussières. La palette de couleurs est par ailleurs bien plus riche en SHO qu’en RGB. Si vous utilisez un capteur couleur, l’utilisation d’un filtre dual-band ou tri-band peut permettre d’acquérir l’ensemble du signal intéressant en une seule passe : privilégiez un filtre très sélectif dans les zones de pollution lumineuse sévère (dual-band ou tri-band : Ha et OIII, avec éventuellement Hb), ou un filtre avec encore plus de bande passante si la pollution lumineuse est inexistante ou faible (filtre quadri-band intégrant également le SII). La seule difficulté avec ce type de filtres est ensuite d’extraire correctement chacune des couches lors du traitement pour pouvoir travailler l’image finale et obtenir de belles couleurs…
A noter que ce genre de filtres peut également présenter un intérêt pour les capteurs monochrome (pour les seules images de nébuleuses par émission) en étant utilisé en lieu et place du filtre de Luminance !
Pour l’imagerie narrowband, il est recommandé de privilégier le SHO plutôt que le HOO. Outre le fait que la palette obtenue est nettement plus intéressante et riche, le signal SII, souvent le plus faible, est très intéressant sur cette cible (voir les images Ha, OIII et SII présentée ci-dessous). N’hésitez pas à compléter vos acquisitions par une petite série d’images en RGB, afin de redonner aux étoiles leurs couleurs naturelles.
Sur un objet aussi imposant, les challenges ne manquent pas ! Réussir à photographier l’ensemble de la nébuleuse – dès lors qu’on ne dispose pas d’un équipement permettant de la faire entrer en une seule fois dans le cadre – est déjà un bel objectif ! Le recours à la mosaïque s’impose alors…
Mais si vous disposez d’une focale élevée, il est possible de privilégier une vue rapprochée afin de gagner en détails : la zone de la « trompe » (avec sa cavité sphérique finale) est bien sûr toute indiquée… mais d’autres zones s’y prêtent très bien également, notamment certaines bandes de poussières. La plus connue est celle en forme de « grenouille », mais beaucoup d’autres méritent d’y consacrer un peu de temps.
Pour les amateurs de « lucky imaging », un challenge peut aussi consister à obtenir le plus de détails possibles dans la zone de la trompe… Attention toutefois, compte-tenu de sa faible luminosité, cette nébuleuse oblige à allonger un peu les temps de pose habituellement utilisés pour cette technique (voir par exemple l’image obtenue par David Dominé avec des poses de 7,5 et 10s.
N’ayant pas moi-même déjà eu à traiter l’ensemble de la nébuleuse IC1396 en RGB, je me garderai bien de donner ici des conseils… je me limiterai donc au narrowband et compléterai plus tard le cas échéant ! 🙂
Pour des conseils de traitement en LRGB(Ha), vous pourrez malgré tout trouver des sources d’inspiration dans les autres fiches-astro dédiées aux nébuleuses de nature similaire, par exemple la nébuleuse du Cœur.
En ce qui concerne le traitement narrowband, on peut souligner en premier lieu que la taille des étoiles n’est généralement pas un souci dès lors que les filtres utilisés sont suffisamment restrictifs. Il peut toutefois être intéressant d’effectuer une légère réduction pour harmoniser la taille des étoiles entre les couches S, H et O. La couche Ha présentant les étoiles les plus fines, une petite réduction bien dosée sur les couches O et S peut éviter d’avoir à gérer de trop forts halos magenta ultérieurement. A noter que si vous avez effectué une série de poses en RGB pour récupérer la couleur des étoiles, et que vous utilisez votre couche Ha comme couche de luminance, cette réduction ne se justifie plus vraiment. Celle-ci conserve toutefois un intérêt si vous utilisez une luminance « mixée » entre les trois couches S, H et O.
Même si je ne suis pas adepte des traitements starless, celui-ci peut s’avérer particulièrement efficace sur ce genre de cible, en particulier s’il est réalisé en mode linéaire (avant la montée d’histogramme) et sous réserve qu’aucune étoile ne génère des artefacts trop flagrants (ce qui est parfois le cas en mode linéaire ou en présence d’aigrettes…). N’hésitez pas à consulter le dernier comparatif des logiciels starless pour en savoir plus sur ces différents aspects.
Assemblage des couches
Voici les couches H, O et S obtenues (fonction STF appliquée uniquement sur les brutes issues d’empilement pour visualisation) :
On note le très beau signal sur la couche SII. Souvent en retrait sur beaucoup d’objets, celui-ci est vraiment incontournable ici pour espérer révéler toutes les subtilités de la structure de la nébuleuse. Le signal OIII, en revanche, est plus limité et se concentre essentiellement sur la zone centrale de la nébuleuse. Attention toutefois : l’image présentée ici ne constituant qu’un « détail » de l’ensemble de l’objet, le signal obtenu peut fortement varier selon la zone de la nébuleuse photographiée et du cadrage retenu.
La forte présence du signal SII va bien sûr avoir une influence sur l’assemblage des couches en vue de la création de l’image « couleurs » qu’il va falloir ensuite calibrer.
Pour l’assemblage des couches, je préconise d’utiliser, en mode linéaire, le process SHO_AIP, très simple d’utilisation, qui permet de mixer directement chaque couche avec de multiples combinaisons et l’application de coefficients différents. Sur cette image, le mixage des couches en mode linéaire s’est révélé infiniment plus simple et rapide à mettre en œuvre que le mixage réalisé (pour l’essai) avec les images en mode non-linéaire. Les nuances obtenues sont beaucoup plus fines et variées, et les halos des étoiles demeurent plus contenus. A noter que pour cette image, l’assemblage a été réalisé en starless et les étoiles ont été réintroduites avec leurs couleurs RGB par la suite sur la base de l’image Ha qui a servi de luminance pour ces étoiles…).
Sauf à ce que vous soyez adepte de la technique « classique » du SHO (sans luminance), vous pourrez utiliser la couche Ha comme couche de luminance. Celle-ci contient l’ensemble des informations et détails utiles. Si vous disposez de couches S et O de bonne qualité et réalisées au même niveau de binning, vous pouvez envisager une luminance mixée avec ces trois couches (généralement, le mix des couches H et O est suffisant, mais le signal SII est ici trop présent pour être écarté !).
Dans ce dernier cas, l’outil de création de la couche Luminance du process SHO_AIP fait également merveille ; en particulier en utilisant le mode d’assemblage “lighten” (équivalent à “éclaircir” dans Photoshop) en cas de mix H, O et S, puisque cette option permet de préserver la couche Ha tout en augmentant le signal dans les seules zones OIII et SII qui proposent un signal supérieur à celui du Ha. Avec un réglage correct des coefficients et du mode d’assemblage, il est assez simple d’obtenir une belle image de Luminance. Attention cependant à veiller que le mix ne réduise pas les avantages de la couche Ha en diminuant les détails ou en augmentant significativement le bruit.
Quelques conseils sur les couleurs…
Pour ce qui est des couleurs elles-mêmes, il n’existe pas de vérité absolue en SHO. La liberté et la créativité sont beaucoup plus grandes qu’en RGB ! On peut toutefois conseiller de garder à l’esprit quelques règles de base afin d’optimiser le résultat…
En premier lieu, la palette de couleurs doit être riche, et présenter dès le départ des nuances de rouge, de vert, de bleu, de jaune. Si tel n’est pas le cas, mieux vaut essayer un autre mixage des couches afin d’obtenir un meilleur équilibre. Même si l’outil Correction Sélective de Photoshop donne de bons résultats, la richesse final des couleurs est essentiellement déterminée par les nuances présentes au début du traitement.
Ensuite, si vous ne traitez pas en starless ou que vous n’avez pas réalisé une série RGB pour corriger la couleur des étoiles, celles-ci peuvent présenter un halo magenta assez prononcé lors de l’assemblage SHO. Il est possible de limiter ce phénomène par une réduction d’étoiles sur les couches S et O, mais pas de l’éliminer totalement. Une désaturation de la couleur magenta permet dans la plupart des cas de corriger la plus grande partie de ce problème. Attention cependant à utiliser un masque d’étoiles lors de cette opération, afin de ne pas diminuer la teinte magenta sur l’ensemble de l’image.
Enfin, l’habitude du traitement RGB conduit souvent à diminuer la présence du “vert” dans l’image. En SHO cependant, cette diminution n’a pas réellement lieu d’être, puisque la couche verte est attribuée au Ha, qui présente le signal le plus présent. Cette réduction excessive du vert conduit souvent à des images d’aspect “bicolore” (HOO) qui offrent beaucoup moins de nuances dans les teintes qu’une palette SHO. Cela serait d’autant plus dommage sur cette nébuleuse que le signal SII est important ! Dans l’image présentée ici, le vert a été légèrement réduit sur l’ensemble de l’image après l’assemblage SHO, mais le moins possible : le but est de garder un équilibre général (éviter que l’image ne devienne un camaïeu de vert sur l’ensemble des structures) tout en le conservant au mieux dans les zones pertinentes, en particulier dans les zones de transition OIII/Ha. Cette présence du vert dans l’image permet d’obtenir des nuances très riches, notamment dans la zone de transition entre le centre de la nébuleuse et les bords de celle-ci, dominés par le signal Ha et SII. La zone centrale de la nébuleuse est cependant dominée par le bleu ; il faut en tenir compte !
Vous pouvez finaliser au besoin l’équilibre des couleurs avec l’outil « Correction sélective » sous Photoshop.
Montée d’histogramme
En ce qui concerne la montée d’histogramme, l’utilisation d’une fonction telle que MaskedStretch donnera en général de bons résultats (attention à l’aspect des étoiles lors de cette opération). Ce type de process permet de mettre en valeur les zones de nébulosités les plus ténues sans saturer les zones les plus lumineuses de l’image. Si la dynamique de l’image via ce process ne vous convient pas, une montée classique (logarithme + montée) peut être réalisée ; mais attention aux zones de transition entre le fond de ciel et la nébuleuse, en particulier si celle-ci rentre en entier dans le cadre. Il est également possible de mixer les deux versions avec le process PixelMath ; en attribuant si besoin des coefficients différends aux deux images.
A noter : si vos images ne contiennent qu’un « détail » de la nébuleuse (comme dans le cas de l’image présentée ici) et pas l’objet dans son ensemble, une difficulté peut-être, en cas d’utilisation de la fonction MaskedStretch, de déterminer une « zone de référence » du fond de ciel, car les nébulosités peuvent être présentes partout dans le champ. Vous pouvez donc devoir gérer une image sans aucune zone de pur « fond de ciel ». A défaut de mieux dans ce cas, une petite zone dans les bandes de poussières peut servir de référence fiable.
Concernant le niveau de fond de ciel, celui-ci peut être rehaussé en cas d’image large sur l’ensemble de la nébuleuse (autour de 30/35), afin de mettre en valeur le maximum de détails, notamment dans les extensions les plus ténues. Dans le cas d’un plan plus rapproché (telle que l’image présentée ici), il sera possible au contraire d’accentuer un peu plus les contrastes, en laissant le fond de ciel à des valeurs habituellement assez basses (autour de 20/25). Dans tous les vas, les valeurs les plus basses sont à réserver pour les zones les plus sombres des bandes de poussière, afin d’assurer un contraste optimal à l’image.
Rehaussement des détails
Une fois l’assemblage des couches SHO et la montée d’histogramme réalisés, les principales difficultés sont derrière vous ! 🙂 Bien sûr, en fonction de vos choix de traitement, certaines opérations peuvent s’avérer nécessaires (traitement différencié de la couche « couleurs » et de la couche « luminance », réintégration des étoiles, correction de la couleur des étoiles avec les images RGB au moyen d’un masque dédié, etc.).
Pour finaliser l’image, il est conseillé de rehausser les détails dans les zones les plus intéressantes, en particulier dans les piliers de gaz et les bandes obscures de poussières. Là encore, l’utilisation de masques adaptés est recommandée afin de localiser au mieux les traitements appliqués.
Un renforcement des détails, que ce soit sous Pixinsight avec la fonction HDRMultiscaleTransform, ou sous Photoshop au moyen de la fonction d’AstroTools Local Contrast Enhancement, donne tous deux de très bons résultats dans ce cas.
Le process DarkStructureEnhance de Pixinsight peut donner de bons résultats sur les bandes de poussières, mais prenez attention de l’utiliser avec parcimonie afin de ne pas perdre de détails au sein de ces structures (l’augmentation du contraste passe souvent par un abaissement de la luminosité dans les zones sombres, ce qui peut être destructeur pour les détails en lissant des zones plus ou moins étendues…). Appliquez de préférence ce traitement sur l’image de luminance et en utilisant un masque pour pouvoir réduire l’intensité du traitement par défaut…
Pour en savoir plus sur la mise en œuvre de ces process de rehaussement de détails, je vous invite à consulter le tutoriel dédié à HDRMT, ainsi que le tutoriel plus général consacré à l’amélioration des détails avec Pixinsight, ainsi que le tutoriel spécifique à Photoshop le cas échéant. Vous y trouverez de nombreux conseils spécifiques en fonction de la nature des détails à rehausser.
Ce serait bien sûr avec un capteur plus grand et en procédant au besoin à une mosaïque, afin de pouvoir photographier l’ensemble de cette superbe nébuleuse !
Avec le même setup, un plan rapproché de la bande de poussières de la « grenouille » serait également une cible intéressante…
Sur l’image obtenue en elle-même, au-delà des restrictions liées au champ et au cadrage, j’apprécie la palette de couleurs que j’ai réussi à obtenir… il ne reste plus qu’à refaire la même chose avec toute la nébuleuse ! 🙂
Si l’espace commentaires n’est pas accessible, consultez le guide pratique pour y remédier !
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