Prise de vue : | |
Traitement : | |
Intérêt LRGB : | |
Popularité : |
Nom : NGC 2237 – Caldwell 49 – Nébuleuse de la Rosette
Type : Nébuleuse par émission
Distance : ~5200 AL
Taille : 80′ x 50′ (130 AL)
Magnitude : 9
Meilleure période d’observation : Hiver
Si cette nébuleuse présente des dimensions apparentes comparables à celles de sa célébrissime voisine, la grande nébuleuse d’Orion (M42), elle est en réalité quatre fois plus éloignée (~5000 AL) et cinq fois plus étendue (130 AL vs 24 AL) : la nébuleuse d’Orion (y compris le « running man ») pourrait ainsi tenir dans la seule zone centrale de la Rosette !
Malgré ces dimensions considérables, la nébuleuse de la Rosette, en raison de son éloignement beaucoup plus important, apparait nettement moins brillante que M42 dans le ciel : alors que cette dernière est visible à l’œil nu y compris sous un ciel de qualité moyenne, la Rosette est pratiquement 100 fois moins lumineuse…
Son observation visuelle nécessite donc un instrument de grand diamètre, l’utilisation d’un filtre spécifique… et un ciel parfaitement noir.
En imagerie, celle-ci reste beaucoup plus accessible, mais inutile de prévoir, comme pour M42, une série de pose courtes pour compenser la saturation du capteur dans les zones les plus brillantes : aucun risque de saturation en vue !
A noter que la Rosette fait partir d’un complexe de nébuleuses bien plus vaste, qui s’étend sur une grande partie de la constellation de la Licorne (voir ci-après).
La nébuleuse de la Rosette est une « pouponnière » d’étoiles très active, où se sont déjà formées de nombreuses étoiles. Au centre de celle-ci, l’amas NGC 2244 est composé d’une cinquantaine d’étoiles très jeunes (8 millions d’années) et majoritairement de type O : il s’agit d’étoiles géantes, bleues et extrêmement lumineuses. La plus massive d’entre elles, HD46150 (située au centre de la zone centrale), est ainsi 60 fois plus massive que notre Soleil et 450 000 fois plus lumineuse.
Bien que de nombreuses autres étoiles naissent de manière éparse dans différentes régions de la nébuleuse, les étoiles de l’amas NGC 2244 sont à l’origine quasiment exclusive de l’ionisation du nuage de gaz alentour, en raison de leur très puissant rayonnement ultraviolet.
Ce rayonnement intense génère autour des étoiles les plus chaudes, telles que HD46150 (>30 000 K) une bulle de plasma, un gaz composé essentiellement d’électrons et de protons à une température supérieure à 10 000 K après l’ionisation des atomes d’hydrogène. Ce plasma étant beaucoup plus « transparent » que le reste du nuage de gaz, il favorise la propagation du rayonnement ultraviolet et l’ionisation du gaz à des distances de plus en plus éloignées de l’étoile centrale.
A mesure que la distance avec l’étoile augmente, la température tend cependant à diminuer, et le gaz redevient de plus en plus « opaque ». On observe donc le plus souvent ces bulles de plasma sous la forme de cavités sphériques d’apparence moins dense au sein de nébuleuses par émission ; comme c’est le cas de manière tout à fait spectaculaire dans la zone centrale de la nébuleuse de la Rosette.
Ce type de phénomène est connu sous le nom de « sphère de Strömgren » ; appelées ainsi en hommage à leur découvreur, l’astrophysicien danois Bengt Strömgren à la fin des années 1930. Les mécanismes physiques à l’œuvre sont toutefois complexes (super radiance, compétition de modes…) et les modélisations demeurent encore incomplètes.
La « bulle » centrale, au centre de la nébuleuse de la Rosette, constitue l’archétype d’une sphère de Strömberg, mais on retrouve ce type de formation dans beaucoup de nébuleuses bien connues (telle que la nébuleuse de la Tarentule dans le Grand Nuage de Magellan, ou encore au sein de la nébuleuse NGC 604 dans la galaxie du Triangle, l’une des plus grandes nébuleuses connues).
La bulle de la Rosette est par ailleurs un cas simple de sphère de Strömgren isolée. Dans la plupart des cas, une multitude de ces sphères peuvent se créer au sein des nébuleuses suffisamment vastes ; leur interactions au moment de leur rencontre générant des ondes de choc se répandant ensuite dans le reste de la nébuleuse.
Les astronomes ont ainsi observé et étudié les interactions de trois de ces sphères dans la gigantesque nébuleuse NGC 604, située dans la galaxie du Triangle (image ci-contre). A noter que celle-ci ressemble à s’y méprendre à la nébuleuse de la Rosette !
Les ondes de choc ainsi générées se propagent dans l’ensemble de la nébuleuse et contribuent à générer des effondrements gravitationnels localisés, au sein des régions plus froides et plus opaques ; lesquelles absorbent l’énergie apportée par l’intense rayonnement ultraviolet et la restituent sous forme de rayonnement infrarouge.
Il en résulte ainsi la création de nouvelles zones de formation d’étoiles dans les régions périphériques de la nébuleuse, au sein des régions obscures et des bandes de poussières ; invisibles en rayonnement visible mais qui se révèlent par l’observation dans l’infrarouge.
L’image ci-contre, réalisée dans l’infrarouge lointain par le télescope Herschel, révèle ainsi de nombreux « cocons » d’étoiles géantes, mais aussi d’étoiles plus modestes comparables au Soleil, au sein de la nébuleuse de la Rosette, en périphérie de la bulle de plasma centrale.
Ces exemples permettent de mesurer la complexité des mécanismes de création d’étoiles au sein d’un système a priori aussi simple qu’un nuage de gaz et de poussières isolé ; et à quel point les interactions entre les différentes composantes jouent un rôle crucial : le rayonnement d’une seule étoile massive au centre de la nébuleuse suffisant à créer des conditions propices à la formation d’une multitude d’autres étoiles dans les régions périphériques…
Une fois n’est pas coutume, je n’ai pas réalisé les acquisitions en étant physiquement à côté du matériel, mais en remote avec un télescope de 500mm de diamètre installé à l’observatoire Chilescope, au Chili.
Le remote présente de nombreux avantages, en particulier lorsque le matériel est hébergé sous des cieux aussi favorables. Tout d’abord, celui de bénéficier d’un ciel de qualité impeccable quasiment toute l’année. Ensuite, celui de pouvoir photographier des objets inaccessibles ou difficiles à photographier depuis nos latitudes : ce n’est certes pas le cas de la nébuleuse de la Rosette, puisque celle-ci dépasse les 45° d’élévation depuis quasiment l’ensemble de la France métropolitaine, mais pouvoir l’observer située à plus de 70° au-dessus de l’horizon est un avantage très appréciable pour espérer gagner des détails dans les petites structures et ainsi exploiter tout le potentiel d’un tel instrument…
Enfin – de manière beaucoup plus prosaïque – le fait de programmer les acquisitions à distance permet de pratiquer l’astronomie plus régulièrement, y compris pendant des moments où cela serait difficilement acceptable socialement, comme au cours de la première nuit d’observation pour cette image pendant le réveillon du 31 décembre ! 😉
Les acquisitions ont été étalées sur 3 nuits, pour un total de 9h20 en SHO (dont 5h pour la couche Ha) : cela reste faible, mais l’un des inconvénients du remote en location est qu’il faut bien partager le temps d’observation avec tous les autres utilisateurs ! Cela étant, sur une telle cible et compte-tenu de la qualité du ciel d’une part, et de la luminosité de l’instrument d’autre part, un tel temps de pose s’avère déjà très correct avec un signal conséquent que l’on peut pleinement exploiter ensuite lors du traitement.
Les images Ha ont été réalisées en bin1, avec des poses unitaires de 20 minutes. Les couches OIII et SII ont quant à elles été réalisées en bin2 (afin de compenser un peu le temps d’acquisition global limité), avec des poses unitaires de 10 minutes.
Mon premier traitement était plus orienté « SHO classique », avec une présence assumée du vert dans l’image et un rouge qui tendait vers le « rouille ». Après quelques temps, j’ai eu envie de reprendre le traitement à zéro au niveau des couleurs et j’ai retenu une palette un peu plus contrastée, avec notamment un bleu plus profond.
Sur le second traitement, j’ai également accentué un peu plus les superbes détails dans la bande de poussières sombres qui traverse la Rosette. Les volumes des nébulosités dans la zone centrale, en revanche, me semblent un peu mieux mis en valeur sur la version initiale ; le retrait du vert entrainant une perte sensible de nuances entre les différentes composantes.
Niveau cadrage, j’ai essayé de centrer au mieux la nébuleuse mais celle-ci déborde assez largement du capteur ; le champ photo proposé par ce setup – bien que large – n’étant pas suffisant pour inclure l’ensemble des extensions de ce complexe. Une mosaïque 4×4 aurait été nécessaire pour inclure l’ensemble de la partie principale de la Rosette, mais d’autres facteurs (notamment financiers…) entrent alors en ligne de compte !
Le but de cette image n’était toutefois pas de proposer une vue d’ensemble de la nébuleuse, mais d’obtenir des détails intéressants dans les différentes structures centrales de celle-ci (amas central, globules de Bok, bandes de poussières…). Sur ce point, le seeing du Chili et le diamètre de l’instrument ont été de précieux atouts !
Matériel :
ASA 20″ Astrograph (f/3,9)
ASA DDM85
FLI PL16803 (-30°)
Filtres Astrodon SHO 3nm
Pixinsight – Photoshop
Acquisition :
Ha : 16 x 1200s bin1
OIII : 12 x 600s bin2
SII : 12 x 600s bin2
Intégration totale : 9h20
Date(s) de prise de vue : 31 déc. 2018, 12 & 15 janv. 2019
Par rapport à sa voisine, la nébuleuse d’Orion, la nébuleuse de la Rosette présente l’avantage de passer un peu plus haut dans le ciel (~45° depuis Paris), ce qui est une bonne chose compte-tenu de sa luminosité bien plus faible. Elle est observable dans de bonnes conditions entre la mi-novembre et la mi-février ; l’idéal étant bien sûr de profiter des plus longues nuits d’hiver pour prolonger les poses en privilégiant les heures proches de son passage au méridien : cela permettra de bénéficier d’une meilleure transparence et de moins de turbulences néfastes à la mise en valeur des (nombreux) détails sur l’image finale.
La principale difficulté est la taille très importante de cette nébuleuse, qui suppose de disposer d’un champ photo assez grand pour pouvoir la saisir en une seule prise : avec un capteur au format APS-C, une focale de 450mm est déjà une limite à ne pas dépasser, sous peine de se priver de certaines extensions intéressantes aux alentours.
Gardez à l’esprit que la mise en valeur de la nébuleuse elle-même sur l’image finale passe également par le contraste proposé avec le fond de ciel environnant.
Les possesseurs de capteurs de plus grand format seront bien sûr avantagés sur ce point, de même que les heureux propriétaires d’astrographes très ouverts et de faible focale (typiquement une FSQ-85), accompagnés le cas échéant de leur réducteur de focale dédié.
A défaut, il est possible de troquer son setup habituel pour un téléobjectif photo (de 200 à 300mm) pour bénéficier d’une vue plus large mais tout aussi intéressante sur la nébuleuse dans son ensemble… ou de réaliser une mosaïque.
Avec une focale encore plus réduite et/ou un capteur plein format (24×36), il est possible de réaliser un panorama plus large encore du complexe de nébulosités qui parcourt la constellation de la Licorne et qui inclut notamment la nébuleuse du Cône ; comme on peut le voir sur l’image ci-contre). Attention à la planéité sur l’ensemble du champ (tilt, coma…) afin de conserver des étoiles ponctuelles jusque dans les coins.
La seconde difficulté est la luminosité relativement faible de cette nébuleuse… Encore que la généralisation des capteurs CMOS très sensibles et à faible bruit de lecture conduit actuellement à réviser certaines appréciations traditionnelles quant à la « faible luminosité » de certains objets : dans le cas de la Rosette, on ne peut plus considérer aujourd’hui qu’il s’agisse d’un objet particulièrement difficile à photographier, même s’il ne fait pas partie des objets les plus faciles du ciel hivernal !
Dans tous les cas, quelle que soit votre caméra et vos choix d’acquisition, un ciel de bonne qualité, transparent et faiblement affecté par la pollution lumineuse, sera toujours un avantage. En effet, si la partie centrale de la nébuleuse (visible sur l’image présentée ici) est suffisamment brillante pour pouvoir être photographiée même dans des conditions peu optimales, les faibles extensions périphériques peuvent rapidement se retrouver « noyées » dans le bruit photonique… Dans ce cas, le recours à des filtres UHC (en particulier pour des acquisitions réalisées avec une caméra couleur) sera d’un grand secours.
Si vous réalisez des acquisitions en narrowband (HOO ou SHO), l’utilisation de filtres très sélectifs (entre 3nm et 6nm) vous permettra dans une certaine mesure de faire abstraction de la pollution lumineuse et de la présence de la Lune… mais attention, cela est surtout vrai pour le filtre Ha ! Pour les filtres OIII et SII, mieux vaut prévoir des acquisitions avec une Lune à moins de 50% : à défaut, vous constaterez une dégradation du signal et devrez en plus gérer des gradients variables (en particulier avec le filtre OIII).
A noter qu’avec l’apparition des nouveaux filtres multiband (dual-band ou tri-band…), les acquisitions en narrowband ne sont plus exclusivement réservés aux caméras monochrome : il est possible d’obtenir également des résultats intéressants avec des caméras couleur.
Le résultat sera certes moins « fin » qu’avec une caméra monochrome (avec en prime une délicate opération d’extraction des couches lors du traitement), mais l’aventure est parfaitement réalisable.
Dans le cas d’une image narrowband, pensez également à consacrer quelques séries de poses plus courtes en RGB afin de redonner aux étoiles leurs belles couleurs naturelles sur l’image finale.
Si vous privilégiez des acquisitions en LRGB, la nébuleuse ressortira avec un aspect beaucoup plus uniformément rouge, en raison de la prédominance du signal Ha. Il est également possible de combiner une image RGB classique à une image narrowband afin de rehausser les couleurs de la nébuleuse ou de leur conférer une teinte plus « naturelle ». Tous les objets ne s’y prêtent pas (car cela conduit souvent à perdre les subtils dégradés apportés par le SHO), mais dans le cas de la Rosette, cela peut contribuer à lui redonner des teintes plus chatoyantes.
Nous n’avons abordé ci-dessus que l’objectif de saisir la nébuleuse dans son ensemble… mais si votre setup ne vous offre pas assez de champ, n’hésitez pas à prendre un contrepied radical et à faire une plongée dans le centre de celle-ci ! Les beaux détails ne manquent pas dans la zone centrale de la nébuleuse (amas central, jets torsadés, globules de Bok…) ainsi que dans la zone de poussières sombres qui s’étend sur une grande longueur en travers de la nébuleuse.
Dans ce cadre, privilégiez une luminance avec un filtre Ha très sélectif et une caméra monochrome, afin de saisir le maximum de détails et de révéler ces zones dans toute leur complexité et avec un contraste optimal ! Ces détails pourront bien sûr être ensuite accentués plus encore lors du traitement…
Que vous réalisiez les acquisitions en LRGB ou en SHO, le traitement de la nébuleuse de la Rosette n’est pas des plus difficiles ! Surtout si on la compare encore à sa proche voisine, la nébuleuse d’Orion : ici pas besoin de mixage HDR pour « décramer » une zone saturée après un long temps de pose, de gestion complexe de la dynamique globale, ou encore d’étoiles très brillantes à proximité…
Même en narrowband (souvent redouté par les débutants), le traitement est finalement assez simple en raison du signal généreux que l’on peut obtenir sur chacune des 3 couches :
Les images présentées ici sont les images sorties d’empilement visualisées en mode STF.
On remarquera que les étoiles sont plus présentes sur les couches OIII et SII : en fonction de l’importance de cette différence, il peut être utile de réaliser une (légère) réduction d’étoiles sur ces deux couches en début de traitement (au stade linéaire) afin d’harmoniser avec la couche Ha. Cela limitera l’apparition de halos magentas lors de la combinaison (si vous n’avez pas réalisé d’acquisition RGB spécifiques pour corriger les étoiles).
A noter que si vous avez effectué une série de poses en RGB pour récupérer la couleur des étoiles, et que vous utilisez votre couche Ha comme couche de luminance, cette réduction ne se justifie pas vraiment. Celle-ci conserve toutefois un intérêt si vous utilisez une luminance « mixée » entre les trois couches S, H et O (voir ci-après).
N’ayant pas moi-même déjà eu à traiter cette nébuleuse en (Ha)RGB, je me garderai ici de donner des conseils trop précis… je me limiterai donc au narrowband et compléterai plus tard le cas échéant ! 🙂 Pour des conseils de traitement en LRGB(Ha), vous pourrez malgré tout trouver des sources d’inspiration dans les autres fiches-astro dédiées aux nébuleuses de nature similaire, par exemple la nébuleuse du Cœur.
Mixage des couches en narrowband / Création d’une luminance composite
Même si le signal de la couche Ha demeure le plus important (sans surprise pour une nébuleuse par émission !), on voit que les deux autres couches ne sont pas en reste. L’image OIII présente un signal global assez élevé et quelques zones très accentuées par rapport à la couche Ha (notamment dans le centre de la nébuleuse). L’image SII, bien que moins contrastée globalement, apporte cependant son lot de petits contrastes plus localisés (en particulier dans les zones périphériques de la nébuleuse), ce qui va permettre d’accentuer certains détails et zones de transition sur l’image finale.
Dans le cas d’une image SHO, cet objet se prête donc bien à un mixage « classique », à savoir une combinaison directe des 3 couches pour former l’image finale : dans ce cas de figure, la gestion de la couleur et des détails se fait dans le même temps (mais avec des process et des masques distincts…). Cette combinaison peut s’effectuer en mode linéaire ou après la montée d’histogramme ; chacune de ces méthodes présentant des avantages et des inconvénients : le mixage au stade linéaire sera généralement plus subtil et nuancé, mais plus complexe à bien équilibrer si les signaux sur les différentes couches sont déséquilibrés. A l’inverse, l’assemblage en mode non-linéaire sera plus simple à équilibrer, mais avec une perte éventuelle de petites nuances dans les zones de transition.
Si vous êtes plus à l’aise avec un mixage L-SHO ou si, comme dans l’image présentée ici, vous n’avez pas réalisé l’ensemble des couches à la résolution maximum de la caméra, vous pouvez utiliser la couche Ha comme image de Luminance.
Toutefois, dans la mesure où les 3 couches présentent des détails assez intéressants et complémentaires, il est recommandé – dans la mesure du possible et en particulier si vos trois couches sont en bin1 – de réaliser une luminance composite résultant d’un mixage des 3 couches (ou des 2 seules couches Ha et OIII dans le cas d’une image HOO).
L’utilisation de la seule couche Ha comme image de Luminance va en effet conduire à estomper certains détails intéressants, présents uniquement sur les autres couches.
Pour réaliser cette combinaison, le script SHO-AIP propose un module de création de luminance très efficace avec lequel il est possible de régler l’ordre des images, leur pondération et le mode de combinaison (normale, éclaircir, assombrir…).
Une méthode assez efficace pour la plupart des images est de placer l’image Ha comme image de base, suivie de l’image OIII puis de l’image SII et de les combiner en mode « éclaircir », afin d’ajouter les zones de signal spécifique de chacune des couches tout en préservant les détails plus fins présents sur la couche Ha (il est possible d’ajuster les % des images OIII et SII afin d’accentuer plus ou moins les zones concernées).
Quelques conseils sur les couleurs…
Pour ce qui est des couleurs elles-mêmes, il n’existe pas de vérité absolue en SHO. La liberté et la créativité sont beaucoup plus grandes qu’en RGB ! On peut toutefois conseiller de garder à l’esprit quelques règles de base afin d’optimiser le résultat…
En premier lieu, la palette de couleurs doit être riche, et présenter dès le départ des nuances de rouge, de vert, de bleu, de jaune. Si tel n’est pas le cas, mieux vaut essayer un autre mixage des couches afin d’obtenir un meilleur équilibre. Même si l’outil Correction Sélective de Photoshop donne de bons résultats, la richesse final des couleurs est essentiellement déterminée par les nuances présentes au début du traitement.
Dans l’exemple suivant, on voit les modifications apportées au mix initial après un passage par la correction sélective (notez que le magenta a été grandement retiré des étoiles) :
Par ailleurs, l’habitude du traitement RGB conduit souvent à diminuer la présence du “vert” dans l’image. En SHO cependant, cette diminution n’a pas réellement lieu d’être, puisque la couche verte est attribuée au Ha, qui présente le signal le plus présent. Cette réduction excessive du vert conduit souvent à des images d’aspect “bicolore” (HOO) qui offrent moins de nuances dans les teintes qu’une palette SHO. Cela serait d’autant plus dommage sur cette nébuleuse que le signal SII est important !
Sur l’exemple ci-dessus (réalisé pour la v1 du traitement), on voit que le vert a été fortement atténué sur la couche couleurs SHO, mais qu’il demeure malgré tout présent dans l’image finale (certains pourront légitimement estimer que ce retrait est déjà trop important). Le traitement v2 propose un retrait de vert plus accentué encore, qui flirte avec une bichromie HOO… Tout est affaire de préférences personnelles !
Starless or not starless ?
Même si je ne suis pas adepte des traitements « full starless« , cette méthode de traitement peut s’avérer particulièrement efficace sur ce genre de cible, sous réserve qu’aucune étoile ne génère des artefacts trop flagrants (ce qui est parfois le cas en mode linéaire ou en présence d’aigrettes…). N’hésitez pas à consulter le dernier comparatif des logiciels starless pour en savoir plus sur ces différents aspects.
Sur cet objet particulier, si réalisé en narrowband, les étoiles sont naturellement assez contenues : de fait, le traitement starless n’apporte pas forcément grand chose par rapport à un traitement classique. Il peut toutefois se justifier afin d’accentuer les détails sans affecter les étoiles et en se dispensant de créer des masques de protection très précis, ou encore pour faciliter le mixage des couches sans trop s’embêter avec la gestion des halos magentas des étoiles. En LRGB cependant, le retrait d’étoiles peut s’avérer un outil pratique pour effectuer différents traitements aux stades linéaires et non-linéaires – y compris la montée d’histogramme sous réserve de bien maitriser la réintroduction d’étoiles au stade ultérieur.
Montée d’histogramme
En ce qui concerne la montée d’histogramme, l’utilisation d’une fonction telle que MaskedStretch donnera en général de bons résultats (attention à l’aspect des étoiles lors de cette opération). Ce type de process permet de mettre en valeur les zones de nébulosités les plus ténues sans saturer les zones les plus lumineuses de l’image.
Attention toutefois, si comme dans l’image présentée ici votre champ ne contient aucune véritable zone de « fond de ciel », le paramétrage correct de la fonction MaskedStretch peut s’avérer difficile, en l’absence de référence pour la fixation du point noir de l’image (avec, à la clé, des résultats peu convaincants, trop lumineux ou trop sombres, ou manquant de dynamique…). A défaut de mieux dans ce cas, une petite zone dans les bandes de poussières peut servir de référence fiable.
Si la dynamique de l’image via ce process ne vous convient pas, une montée classique (logarithme + montée) est tout à fait envisageable avec de bons résultats. Attention dans ce cas aux zones de transition entre les zones les plus ténues et les parties principales de la nébuleuse.
Il est également possible de mixer les deux versions MaskedStretch et montée d’histogramme classique avec le process PixelMath ; en attribuant si besoin des coefficients différends aux deux images.
Concernant le niveau de fond de ciel, celui-ci peut être rehaussé (autour de 30/35) en cas d’image resserrée n’incluant aucune zone de « pur » fond de ciel (comme sur l’image présentée ici), afin de mettre en valeur le maximum de signal dans les extensions les plus ténues. Dans le cas d’un plan plus global (incluant du « pur » fond de ciel), il sera sans doute préférable d’accentuer un peu plus les contrastes, en laissant le fond de ciel à des valeurs habituellement assez basses (autour de 20/25). Dans tous les vas, les valeurs les plus basses sont à réserver pour les zones les plus sombres des bandes de poussière, afin d’assurer un contraste optimal à l’image.
Rehaussement des détails
Pour finaliser l’image, il est recommandé de rehausser localement les nombreux détails différents dans la nébuleuse et notamment les détails dans les bandes obscures de poussières. Ces traitement s’appliquent dans tous les cas sur l’image de luminance. Si vous avez opté pour une combinaison SHO classique sans luminance, vous pouvez « extraire » la luminance de l’image, y apporter des modifications, et la recombiner ensuite avec la couche couleurs.
Pour l’ensemble de la nébuleuse, il est possible de pousser un peu les détails dans les zones les plus brillantes de la nébuleuse qui présentent un rapport signal sur bruit plus satisfaisant. Il est donc recommander de travailler sur les zones concernées en les isolant au moyen de masques adaptés, afin de localiser les traitements appliqués. Un renforcement des détails, que ce soit sous Pixinsight avec la fonction HDRMultiscaleTransform, ou sous Photoshop au moyen de la fonction d’AstroTools Local Contrast Enhancement, peut donner des résultats intéressants. Attention toutefois : les zones de nébulosités étant assez homogènes sur cet objet, la dynamique globale de l’objet peut rapidement décliner, sans pour autant faire gagner en détails de manière significative.
Un renforcement des zones sombres (bandes de poussières au sein de la nébuleuse…) est en revanche plus efficace, par exemple avec le process DarkStructureEnhance (DSE) sous Pixinsight. Attention cependant à ne pas pousser trop fort ces accentuations des zones sombres, au risque de perdre des détails dans ces zones (dégradés de luminosité) et de rapidement donner à l’image un aspect artificiel ou « sur-traité »… L’augmentation du contraste passe souvent par un abaissement de la luminosité dans les zones sombres, ce qui peut être destructeur pour les détails en lissant des zones plus ou moins étendue : appliquez de préférence ce traitement en utilisant un masque pour pouvoir réduire l’intensité du traitement par défaut.
Pour en savoir plus sur la mise en œuvre de ces différents process de rehaussement de détails, je vous invite à consulter le tutoriel dédié à HDRMT, ainsi que le tutoriel plus général consacré à l’amélioration des détails avec Pixinsight, ainsi que le tutoriel spécifique à Photoshop le cas échéant.
Cette image est le résultat d’une frustration : celle de ne pas avoir l’opportunité, plusieurs saisons consécutives, de ne pas pouvoir photographier cet exceptionnel objet du ciel hivernal. Je me suis donc décidé à la réaliser via un équipement en remote, mais il faudra bien que je la fasse « moi-même » avec mon propre matériel lorsque l’occasion se présentera.
Dans la mesure où j’aurais bien du mal à approcher le niveau de détails de cette version, je privilégierai plutôt une vue globale de la nébuleuse et de ses extensions, en narrowband.
Cet objet se prête bien de toutes manières à une multitude d’interprétations différentes et il est possible d’y revenir à de nombreuses reprises sans refaire la même image…
Sur cette image précise, je suis aussi tenté en la voyant d’y revenir pour une troisième version avec des couleurs modifiées.
Si l’espace commentaires n’est pas accessible, consultez le guide pratique pour y remédier !
Vous appréciez Photon Millenium et peut-être même le consultez-vous régulièrement ? Vous souhaitez soutenir mon travail et contribuer au développement du site ? Vous avez amélioré vos traitements grâce aux tutos et souhaitez m’offrir un café en retour ? 😉
Vos dons, grands comme modestes, m’aideront à supporter les différents frais liés à la vie du site (hébergement, plugins, logiciels, etc.) tout en continuant de bannir les publicités !
Un immense merci pour votre précieux soutien ! 🙂