Amélioration du setup (3) : nouvelle caméra et rotateur de champ
Une nouvelle caméra et un nouveau train optique intégrant un rotateur de champ… le setup est désormais quasi-totalement automatisé pour les séances d’acquisition !
Observées et étudiées depuis l’antiquité, les comètes comptent sans conteste parmi les plus beaux spectacles du ciel.
Leur nature est cependant demeurée inconnue pendant de nombreux siècles. Ainsi, Aristote considérait qu’il s’agissait de phénomènes météorologiques, internes à l’atmosphère de la Terre. D’autres ont vus en elles des messagers divins, ou encore le présage de quelques catastrophes (guerre, épidémies, famines, incendies, etc.). Confirmant l’intuition de Sénèque selon laquelle les comètes seraient des astres errants revenants à des périodes plus longues qu’une vie humaine, il a fallu attendre la fin du XVIIe siècle pour que Isaac Newton et Edmond Halley établissent définitivement leur appartenance au système solaire, leur caractère périodique et calculent la trajectoire d’une comète, permettant ainsi de prévoir avec exactitude ses prochaines apparitions.
Malgré tout, la nature exacte de ces astres demeurait mystérieuse.
Seule certitude alors : pour expliquer leurs trajectoires fortement elliptiques et la distribution quasi-aléatoire de leur inclinaison sur l’écliptique, l’origine des comètes était à rechercher à grande, très grande distance du Soleil, aux confins du système solaire.
C’est l’astronome Jan Oort qui, dans les années 1950, émettra l’hypothèse de l’existence d’un immense « réservoir » de comètes, en forme de sphère, à une distance comprise entre 40.000 et 150.000 unités-astronomiques du Soleil. Ce « nuage de Oort », encore hypothétique, serait le reliquat du disque protoplanétaire qui se serait formé autour de notre étoile après l’effondrement de la nébuleuse primordiale il y a 4,6 milliards d’années, et contiendrait au bas mot 100 milliards de noyau cométaires.
De manière aléatoire, de légères perturbations gravitationnelles viennent occasionnellement perturber l’un de ces corps, qui est alors attiré vers le centre du système solaire. Ce point de départ très lointain explique la trajectoire très elliptique de certaines comètes.
Conséquence directe de cette théorie : les comètes seraient les plus vieux vestiges du disque protoplanétaire, voire même les plus vieux objets du système solaire. Alors que les planètes se sont formées il y a ~4,5 milliards d’années, les comètes seraient plutôt âgées de 4,6 milliards d’années. Une différence certes minime, mais fondamentale puisque les comètes seraient alors les plus anciens « fossiles » de la nébuleuse primordiale ayant donné naissance au système solaire. L’étude des comètes et de leur composition est dès lors susceptible de révéler des informations de la plus haute importance sur l’état initial et la formation du système solaire.
C’est pourquoi, depuis les années 1980, de nombreuses missions ont eu pour but d’aller observer au plus près certaines comètes.
En 1986, la sonde Giotto réussissait la performance de se rapprocher à moins de 600 km de la comète de Halley, et livrait le premier cliché d’un noyau cométaire.
En 2015, la sonde Rosetta allait encore plus loin, en se plaçant en orbite autour de la comète « Tchouri » (67P/Tchourioumov-Guérassimenko) et en réussissant à poser sur le noyau le petit atterrisseur « Philae ». Au-delà de la performance technique exceptionnelle, cette mission a engrangé une énorme quantité de données qui seront exploitées pendant de longues années encore.
Sur la photographie ci-contre, prise au plus près de la comète, on voit parfaitement la structure du noyau ainsi que les « jets » de matière à l’origine de la chevelure et de la queue.
En effet, en se rapprochant de plus en plus du Soleil (entre 3 et 1 UA), la glace qui compose essentiellement la comète est sublimée sous l’action du rayonnement et du vent solaire. Il se forme alors autour du noyau une « chevelure » de forme sphérique, puis plusieurs « queues » qui donnent à la comète son aspect spectaculaire :
Les quelques « grandes comètes » qui ont marqué l’histoire (ou les mémoires, pour les plus récentes) ont toutes eu pour particularité de présenter une queue de poussière de dimension apparente très importante, soit en raison de leur dimension intrinsèque, soit en raison de leur passage à proximité de la Terre.
On peut ainsi citer, parmi les « stars » de ces dernières décennies les comètes Hyakutake (en 1996), Hale-Bopp (1997), ou encore la comète McNaught (2008, ci-contre), sans doute la comète la plus impressionnante du XXe siècle ; cette dernière ayant présenté une queue de poussières s’étendant sur 40° et ayant été visible en plein jour au plus haut de son activité… un spectacle exceptionnel mais malheureusement uniquement visible depuis l’hémisphère sud.
Les astronomes, professionnels et amateurs, sont continuellement en attente de la prochaine « grande » comète. Malheureusement, avec les comètes, la seule certitude est leur imprévisibilité !
Ainsi, la comète Atlas, annoncée comme spectaculaire lors de son approche du Soleil et potentiellement comme la « grande » comète de 2020, s’est finalement désintégrée sous l’effet du rayonnement de notre étoile ; et sa luminosité est ensuite rapidement retombée.
Mais, à peine cet espoir était-il éteint qu’une autre comète prometteuse est apparue dans la même région du ciel : « Swan » (C/2020-F8).
D’abord visible depuis hémisphère sud, Swan a connu une période de sursaut d’activité au début du mois de mai, en développant une queue s’étalant sur 7° (soit tout de même 14 fois la taille apparente de la pleine Lune) et laissant espérer une visibilité à l’œil nu lors de son passage au plus près du soleil. Tenions-nous là enfin la « grande comète » de 2020 ? Malheureusement non : ce sursaut d’activité a été suivi d’une baisse d’éclat puis d’une stagnation ; aussi les observations depuis l’hémisphère nord se sont révélées bien moins spectaculaires que prévu. S’agissant d’une « nouvelle » comète n’ayant jamais traversé le système solaire auparavant, l’évolution de sa luminosité est en effet particulièrement difficile à prévoir.
C’est donc sans doute lors au tout début de sa période d’activité maximum que l’équipe Ciel Austral a eu la chance de réaliser la superbe image de la comète Swan présentée ici.
La comète étant très basse sur l’horizon depuis l’observatoire du Chili, l’équipe a choisi de réaliser des poses sur 2 nuits, afin de disposer d’un temps d’intégration suffisant… d’à peine cinquante minutes ! Une fois n’est pas coutume pour Ciel Austral, qui habituellement cumule plusieurs centaines d’heures de poses pour chaque image !
La chevelure et la queue de la comète sont magnifiquement mises en valeur, et présentent une grande finesse et de belles couleurs. Soulignons l’excellent travail de traitement, car les acquisitions ont été réalisées en LRVB avec une caméra monochrome. Or, la comète se déplaçant par rapport aux étoiles d’une pose à l’autre, la réalisation d’une telle image implique de recaler non seulement chacune des couches (L, R, G et B), mais également de procéder à un alignement distinct pour la comète et pour les étoiles, afin que les deux soit parfaitement nettes.
Encore une superbe réalisation signée Ciel Austral, et un beau souvenir de cette comète qui, à défaut d’être « la grande comète de 2020 », aura procuré un beau spectacle aux amateurs au cours du mois de mai !
Est-il besoin de présenter la « team » Ciel Austral ?
Composée de 5 passionnés disposant chacun de compétences propres, Jean-Claude Canonne, Didier Chaplain, Laurent Bourgon, Philippe Bernhard et Nicolas Outters (de gauche à droite sur la photo), cette équipe repousse les limites de l’astrophotographie en cumulant sur chacune de ses images des temps de pose colossaux et à peine concevables pour l’amateur moyen ; avec notamment un record à 1060h (!) de pose pour une mosaique du Grand Nuage de Magellan !
Ciel Austral a installé son setup en remote sous le ciel magique du Chili, à l’observatoire El Sauce. Le matériel utilisé est de très grande qualité, et d’autres projets sont actuellement en développement…
Résumer Ciel Austral au temps de pose de ses images ou au matériel employé n’aurait toutefois aucun sens : il s’agit uniquement en l’occurrence des moyens consacrés à une quête continuelle de perfection et de (re)découverte des beautés de l’Univers.
Le meilleur moyen de s’en convaincre est encore de parcourir leur galerie, où chaque image est en soi un petit bijou qui, au-delà de l’aspect purement esthétique, permet de se sentir plus proche des merveilles du Cosmos…
Date : 1 & 2 mai 2020
Lieu : Observatoire El Sauce (Chili)
Optique : TEC 160 FL f/7
Monture : Paramount Mx+
Caméra : Moravian G4-16000
L : 25 x 60 (bin1)
R : 8 x 60s (bin1)
G : 8 x 60s (bin1)
B : 8 x 60s (bin1)
Total : 49min
Les Photons d’Or récompensent chaque mois une image particulièrement remarquable réalisée par un amateur… n’hésitez pas à proposer vos images !
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